L’Homme qui ne pouvait pas être Enterré

Dumfries

Vers la fin du 17e siècle, à Dumfries, en Écosse, un homme qui venait de mourir se révéla impossible à enterrer, au grand désespoir de sa famille et de ses concitoyens.

Au cours du mois de septembre 1672, M. Donald Beamish, un vieillard de fortune ordinaire qui vivait à la périphérie de la ville de Dumfries, en Écosse, fut saisi d’une fièvre si violente qu’il devint bientôt convaincu de l’imminence de sa mort. Sa famille et ses amis tentèrent de le rassurer, lui promettant de nombreuses et heureuses années, mais comme il s’obstinait dans son idée et que son état se continuait à se dégrader, alors ils finirent par accepter l’inéluctable.

Le 27 septembre, le vieil homme, qui était assis dans son lit, regarda sa femme d’un air grave et il lui déclara solennellement qu’il lui faudrait le faire ensevelir dans les trois heures suivant sa mort ou elle ne serait plus jamais en mesure de le faire. Mme Beamish fut quelque peu surprise de ces paroles, mais pensant que la fièvre le faisait délirer elle ne leur accorda que peu de crédit. Le vieillard sembla réaliser qu’elle ne le prenait pas au sérieux car tout au long de la journée il lui répéta la même chose, prévenant également tous ceux qui venaient le visiter que personne ne pourrait jamais faire sortir son corps de la maison s’il y restait plus de trois heures après son décès. Intrigués, certains lui demandèrent d’où lui venait une aussi étrange pensée mais M. Beamish leur répondit qu’il en serait ainsi sans donner plus de précisions. Alors, comme le vieil homme semblait s’entêter dans ses divagations, sa pauvre femme, qui désespérait de le voir ainsi tourmenté, lui promit qu’il en serait fait selon sa volonté.

Le lendemain, le mercredi 28 septembre, Donald Beamish mourut l’esprit en paix et se rappelant de la promesse qui lui avait été faite, tout le monde s’affaira pour l’enterrer rapidement, non pas que quiconque ait cru un mot de ses élucubrations mais par respect pour sa mémoire. Malheureusement, malgré tous leurs efforts, les trois heures s’étaient déjà écoulées quand les envoyés de l’entreprise de pompes-funèbres se présentèrent pour l’emporter au cimetière, qui se trouvait un kilomètre et demi de distance.

Les quatre porteurs s’approchèrent du cercueil, qui avait été posé sur la table de la grande salle du rez-de-chaussée comme le voulait la coutume, mais quand ils tentèrent le soulever, ils s’en trouvèrent incapables. Ils essayèrent à plusieurs reprises puis, comme tous leurs efforts semblaient vains, ils finirent par se résoudre à demander de l’aide à certains messieurs de l’assistance, lesquels acceptèrent de leur prêter main forte sans plus de résultat. Après concertation, il parut judicieux d’aller chercher les hommes les plus forts du village, mais quand ils voulurent emporter le cercueil, qui n’était rien de plus qu’une caisse de bois des plus banales, il resta désespérément cloué à la table. Alors, comme il leur était impossible de le déplacer, ils eurent l’idée de transporter la table, mais cette dernière refusa obstinément de se laisser emmener, semblant même ancrée dans le sol. Pendant plusieurs heures, toutes les personnes présentes s’efforcèrent de faire bouger le cercueil de toutes les manières possibles, le tirant et le poussant sans arriver à rien, puis la fatigue commença à se faire sentir et il fut décidé de le laisser en place jusqu’au lendemain matin.

Restée seule avec ses enfants, la malheureuse veuve réfléchissait à ce mystère quand soudain elle se souvint des paroles de son mari et se demandant si elles n’étaient pas prophétiques, elle se mit à prier. Elle espérait que l’entreprise de pompe-funèbre, qui lui avait promis d’envoyer de nombreux hommes le lendemain, parviendrait à la débarrasser de l’encombrant cercueil, mais le jeudi matin, quand les porteurs tentèrent de l’emporter, ils s’en trouvèrent une nouvelle fois incapables. Après un certain nombre de tentatives infructueuses, les employés des pompes-funèbres proposèrent d’emmener la la table, mais tout comme la veille, rien ne put la faire bouger et Mme Beamish comprit alors que rien ni personne ne pourrait jamais faire sortir le cercueil de sa maison.

Quelques heures plus tard, comme la situation semblait s’enliser, des mesures radicales furent prises et un attelage de bœufs fut amené, qui devait tirer le cercueil à l’extérieur de la maison. Pour réaliser cette opération, une paroi du bâtiment dut être détruite, puis les bœufs furent attachés au cercueil et incités à aller de l’avant mais malgré leur immense force ils ne purent le faire bouger de la table. Les cordes étaient si tendues qu’elles finirent par casser sans qu’il ne se soit déplacé d’un millimètre.

Pensant que rien ne pourrait faire bouger le cercueil si des bœufs n’y arrivaient pas, certains proposèrent de l’ouvrir et de retirer le corps mais d’une explicable manière, quand vint le moment d’en soulever le couvercle, personne ne put y parvenir. Ils tentèrent alors de le forcer, quitte à l’endommager, mais le cercueil semblait protégé par une mystérieuse force et rien ne pouvait l’abîmer. Alors, en désespoir de cause, la veuve et ses enfants furent relogés et le cercueil resta dans la maison. Trois jours plus tard, une rumeur commença se rependre qu’un cercueil que personne ne pouvait bouger avait été abandonné dans une maison près de Dumfries et grand nombre de personnes affluèrent pour contempler ce prodige. Certains qui s’arrêtaient tentaient parfois de soulever ou de briser le cercueil, sans jamais y parvenir.

Le propriétaire, qui vivait à quelques kilomètres de là mais qui avait été averti de la situation, décida d’aller voir par lui-même de quoi il en retournait mais en arrivant sur place il découvrit que sa maison était pratiquement effondrée et comprenant qu’il ne parviendrait plus jamais à la louer, il décida de la faire brûler. Enchantés par cette idée, qui résolvait également le problème de l’enterrement, les villageois se réunirent pour y mettre le feu et pendant que les flammes dévoraient le bâtiment, le prêtre tint un service funéraire pour l’âme du vieux Donald Beamish. Au bout d’un certain temps la fumée commença à se dissiper et les spectateurs horrifiés découvrirent alors que le cercueil et la table se dressaient toujours au milieu des pierres noircies, mystérieusement intacts. Alors, comme rien ne semblait pouvoir venir à bout de cette malédiction et qu’ils ne pouvaient rien faire d’autre, les proches du défunt décidèrent de l’ensevelir sur place et toutes les personnes présentes les aidèrent à recouvrir le cercueil jusqu’à ce qu’il disparaisse sous une bonne couche de terre et de pierres.

L’endroit où se trouvait la maison s’est perdu dans le temps mais quelque part dans les collines qui entourent la petite ville de Dumfries se trouve toujours le cercueil de Donald Beamish, l’homme qui n’a jamais pu être enterré.

Source: The Immovable Coffin of Donald Beamish The Man They Could Not Bury.

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