Psychose, l’Histoire d’Edward Gein

Maison Psychose

Tout le monde connaît Psychose (Psycho), le film légendaire réalisé par Alfred Hitchcock en 1960. En 1959, Alfred Hitchcock n’avait aucune idée quand au sujet de son prochain long métrage mais alors qu’il lisait le New York Times, il remarqua une excellent critique du roman Psychose (Psycho) de Robert Bloch. Alors qu’il se rendait en Angleterre, il aperçut, à l’aéroport, le livre en question et le lut durant son voyage. Le roman Psychose décrivait la vie d’Ed Gein, un psychopathe nécrophile interpellé peu de temps auparavant aux États-Unis. Lors de son arrivée à Londres, Alfred Hitchcock savait de quoi parlerait son prochain film.
Tout comme Massacre à la Tronçonneuse, Psychose est donc inspiré de la vie d’Edward Gein, dont voici l’histoire.

Edward Gein

Edward Theodore Gein vit le jour le 27 Août 1906 dans la petite ville de La Crosse, dans le Wisconsin. Ses parents, George Philip et Augusta Tiffany Wilhelmine Gein étaient tous deux originaires de la région et ils avaient deux fils, Henry George et son jeune frère, Edward Theodore. Augusta méprisait profondément son mari. Elle lui reprochait son alcoolisme et les difficultés qu’il rencontrait à garder un emploi mais elle ne pouvait se résoudre à divorcer en raison de ses croyances religieuses.

La Ferme des Gein

Depuis la naissance de son fils Edward, Augusta tenait une petite épicerie dont elle était propriétaire et qui lui rapportait suffisamment pour entretenir sa famille mais cette situation ne lui convenait guère. En 1914, après avoir économisé durant quelques années, elle acheta une ferme isolée près de Plainfield, afin d’éloigner ses enfants de toute cette corruption qui lui semblait régner en ville.
Chaque après-midi, Augusta lisait la Bible à ses deux garçons, leur choisissant plus particulièrement des versets de l’Ancien Testament qui parlaient de châtiment divin. Elle les mettait en garde contre l’immoralité du monde, l’alcoolisme, mais surtout, elle les prévenait de se garder des femmes. Elle avait la conviction que toutes les femmes, sauf elle bien entendu, n’étaient que des pécheresses, des dépravées, et des instruments du diable.
Le jeune Edward ne quittait leur propriété que pour se rendre à l’école. La plupart du temps, il était employé aux différentes corvées de la ferme.

Le jeune garçon était d’un naturel calme, timide, efféminé, et il devint tout naturellement la cible de ses petits camarades. Il riait parfois tout seul, sans raison apparente, et les autres enfants, tout comme ses instituteurs, trouvaient son comportement étrange. Edward n’avait pas d’amis et quand il arrivait à s’en faire, sa mère s’y opposait immédiatement. Malgré son isolement, il n’était pas mauvais à l’école, et ses résultats étaient même plutôt bons, notamment en lecture.
Bien que la rigidité de sa mère l’attrista, Ed essayait de se conformer à ses directives et de lui apporter satisfaction. Malheureusement, Augusta n’était pas vraiment fière de ses fils et elle les corrigeait souvent. A ses yeux, les deux garçons étaient destinés à devenir des moins que rien, tout comme leur père. A l’âge de 13 ans, comme l’avait été son frère avant lui, Edward fut retiré du cursus scolaire afin de se consacrer entièrement aux travaux des champs. De ce fait, pendant toute leur adolescence, Henry et Ed vécurent coupés du monde extérieur et de ses tentations, totalement sous l’emprise de leur mère.

Le 1er avril 1940, à l’âge de 66 ans, George Gein mourut d’une insuffisance cardiaque due à son alcoolisme. A la mort de leur père, Henry et Ed commencèrent à proposer leurs services pour effectuer divers petits travaux dans la ville voisine afin d’aider financièrement leur mère. Les deux garçons avaient bonne réputation et tous les habitants de La Crosse les estimaient fiables et honnêtes. Ed gardait souvent les enfants des voisins, c’était un travail qu’il appréciait tout particulièrement car il lui était beaucoup plus facile de s’ouvrir aux enfants qu’aux adultes.

En 1941, Henry se rebella contre sa mère dont il rejetait totalement les percepts. Il la critiquait ouvertement, même en présence de son frère qui avait du mal à supporter ces attaques verbales et répondait par des coups.
Henry fréquentait une femme divorcée depuis quelques temps, une mère célibataire de deux enfants, et il avait prévu de s’installer avec elle. Il pensait donc quitter la ferme familiale mais il ne pouvait s’empêcher de s’inquiéter pour son petit frère qui portait une telle affection à leur mère.
Le 16 mai 1944, alors que les deux frères brulaient la végétation des marais qui avait envahi la propriété, le feu qu’ils avaient mis aux broussailles devint soudain incontrôlable, attirant l’attention des pompiers. Selon les différents témoignages, Henri et Ed s’employèrent à éteindre les flammes chacun de leur coté mais lorsque vint le soir, une fois l’incendie maitrisé et les pompiers partis, Ed rapporta que son frère demeurait introuvable. Il téléphona à la police et deux agents se rendirent sur les lieux afin de fouiller les environs. Augusta, Ed et les deux homme sortirent alors dans la nuit, équipés de lanternes et de lampes de poche. Étrangement, Ed les conduisit directement près du corps de son frère. Henry gisait sur le sol, face contre terre, dans un endroit visiblement épargné par les flammes et il semblait se trouvait là depuis un long moment.
Quelques contusions furent relevées sur sa tête, mais comme son corps ne présentait ni blessures ni brûlures, le médecin légiste en conclut à une mort par défaillance cardiaque et aucune autopsie ne fut pratiquée. Officiellement, Henry avait été asphyxié par la fumée de l’incendie.
Si certains enquêteurs suspectèrent Edward Gein d’avoir tué son frère, aucune accusation ne fut déposée contre lui et les autorités validèrent la thèse de l’accident.

Edward et sa mère se retrouvaient donc seuls. Peu de temps après la mort d’Henry, Augusta fut victime d’une attaque qui entraina une paralysie temporaire et Ed se consacra entièrement à son bien-être.
Un jour de 1945, Ed et sa mère visitèrent un de leurs voisins, un homme du nom de Smith, afin de lui acheter de la paille. Lorsqu’ils arrivèrent sur place, l’homme était en train de battre son chien. Une femme sortit de la maison et lui cria d’arrêter mais Smith ne voulut rien entendre et battit le chien à mort. Augusta fut bouleversée par cette scène. Mais, contrairement à ce que l’on pourrait croire, elle ne fut pas affligée par la mort du chien, mais par la présence de cette femme qui était sortie de la maison. Sur le chemin du retour, elle expliqua à Ed que Smith n’était pas marié et que cette femme n’avait donc rien à faire là. A ses yeux, cette femme était devenue  » La prostitué de Smith « .
Quelques temps plus tard, Augusta subit une deuxième attaque et sa santé se détériora rapidement. Elle mourut le 29 décembre 1945, à l’âge de 67 ans. Ed était dévasté par sa mort. Il avait  » perdu son seul ami, son seul véritable amour et il se retrouvait absolument seul au monde « .

Edward Gein

Après la mort de sa mère, Edward Gein, qui était alors âgé de 39 ans, continua à occuper la demeure familiale. Il condamna toutes les pièces où Augusta avait l’habitude de séjourner, sa chambre, la salle de séjour et le salon, les laissant intactes, exactement dans l’état où elles se trouvaient au moment de sa mort. Puis, quelques temps plus tard, il se réfugia dans une petite salle près de la cuisine qui devint sa chambre. Ce fut à ce moment-là qu’il bascula dans la folie.
Maintenant qu’il se retrouvait seul, Ed pouvait afficher son intérêt pour la gent féminine et les magasines de charme. S’il était fasciné par les photos qu’il y trouvait, il raffolait également des histoires qui décrivaient les atrocités commises par les nazis, celles qui parlaient de cannibalisme, de coupeurs de tête ou celles qui traitaient du culte des morts.

En 1951, le gouvernement fédéral lui donna une subvention pour laisser ses terres en jachère et Ed abandonna tout travail à la ferme. On le voyait rarement à Plainfield. Il s’y rendait parfois lorsqu’il avait besoin de faire une course ou lorsqu’il était embauché pour effectuer quelques travaux pour l’un des habitants de la ville. L’argent de ces petits boulots lui permettait de survivre. Parfois, rarement, il s’arrêtait prendre un verre à la taverne de Mary Hogan et il racontait aux habitués les horribles histoires qu’il avait lues. Quand Mary Hogan disparut en 1954, Ed affirma à l’un des clients du bar qu’elle se trouvait chez lui et l’homme pensa alors que c’était encore l’une de ces blagues d’un gout douteux dont Ed Gein semblait raffoler.  Il allait s’apercevoir de se méprise bien des années plus tard.
Un jeune de 16 ans, qui venait souvent visiter Ed pour jouer au ballon ou regarder des films avec lui, avait rapporté qu’il avait vu des têtes réduites dans sa maison. Ed lui avait expliqué que ces têtes étaient des souvenirs des Philippines, qu’un cousin ayant servi sur les îles durant la Seconde Guerre mondiales lui avaient envoyées, mais personne ne l’avait cru. Même si son humour était spécial et ses plaisanteries parfois cruelles, les habitants de Plainfield trouvaient qu’Ed n’avait pas vraiment changé depuis la mort de sa mère. Il était toujours le même homme étrange qui avait désespéramment besoin d’un bon bain.

Le 16 novembre 1957, les rues de Plainfield étaient pratiquement désertes en ce jour d’ouverture de la chasse. En fin d’après-midi, après être allé chasser, comme tant d’autres, Frank Worden, adjoint du shérif, retourna en ville et il s’arrêta à la quincaillerie que possédait sa mère, Bernice, une veuve de 58 ans. Étrangement, elle n’était pas là. Elle semblait avoir disparu en laissant toutes les portes du magasin ouvertes et la lumière allumée.
Le policier remarqua rapidement que la caisse enregistreuse avait été dérobée et qu’une flaque de sang s’étalait sur sol, formant une trainée qui menait au parking situé à l’arrière du bâtiment. Un bordereau sur le comptoir lui apprit que la dernière personne à avoir vu sa mère était apparemment Ed Gein, qui était passé chercher un bidon d’antigel le matin même.
Frank prévint aussitôt Art Schley, le shérif de la ville, qui se rendit à la ferme d’Ed Gein afin de l’interroger sur la disparition de Mme Worden. En réponse aux questions des enquêteurs, Ed Gein tint des propos confus et contradictoires et une fouille de la propriété fut donc décidée.
Le shérif et ses hommes se dirigèrent tout d’abord vers la cuisine d’été, une petite pièce attenante aux bâtiments. Elle était fermée à clef et ils durent enfoncer une petite porte de bois. En pénétrant dans la maison, ils furent saisis par l’épouvantable odeur qui y régnait. A ce moment-là, la nuit était tombée et la cuisine se trouvait plongée dans l’obscurité. Avançant dans la pénombre, le shérif se heurta à une masse accrochée au plafond qu’il prit tout d’abord pour une carcasse d’animal. Mais, éclairant l’endroit de sa lampe-torche, il s’aperçut avec effroi que ce qu’il avait tout d’abord pris pour un cerf était en réalité le corps d’une femme suspendue par les pieds à l’une des poutres. Ses poignets étaient ligotés à l’aide de cordes, elle avait été décapitée et éventrée comme on l’aurait fait pour un animal. Le shérif venait tout juste de découvrir Bernice Worden, la mère de son adjoint.

La cuisine d’Ed Gein

Épouvanté, il demanda immédiatement des renforts et, un peu plus tard dans la nuit, une douzaine de policiers se présentèrent sur les lieux. Sachant que la vieille ferme n’était pas alimentée en électricité, ils avaient pris soin d’apporter avec eux des lampes et un générateur.
Toute la maison semblait laissée à l’abandon. Elle était sale, poussiéreuse, et le sol des deux pièces où vivait Ed était recouvert de cartons, de restes de repas en putréfaction, de vieux magazines, de livres, de vêtements sales et autres détritus. Mais ce désordre n’était rien à coté de ce qu’ils allaient découvrir.
Lors d’un sinistre inventaire, furent répertoriés, entre autres, dix têtes de femmes aux crânes sciés, des sièges de chaise recouvertes de peau humaine, un abat-jour fabriqué à partir de la peau d’un visage humain, des bols fabriqués à partir de crânes humains, une chemise et des gants en peau humaine, une ceinture fabriquée à partir de mamelons de femme, neuf masques de peau humaine, neuf vulves dans une boite à chaussures, quatre nez, des lèvres sur un cordon de store, des crânes servant de décoration sur des pieds de lit, des os et des fragments humains, un  » costume de femme  » en peau humaine, la tête de Marie Hogan et celle de Bernice Worden dans des sacs ainsi que divers organes et membres humains. Les têtes réduites qu’Ed s’était vanté de posséder étaient en réalité des peaux du visage humain soigneusement prélevées sur des cadavres et utilisées par Gein comme masques. Tous ces objets furent photographiés et confiés au laboratoire pour analyse avant d’être détruits.

Lors de ses différents interrogatoires, Ed Gein confia aux enquêteurs que peu après la disparition d’Augusta, il avait eu envie de changer de sexe et l’idée lui été venue de se créer un  » costume de femme  » à l’image de sa mère afin de s’en travestir. Pour obtenir la matière nécessaire à sa réalisation, Ed choisissait des femmes d’âge moyen qu’il connaissait où celles dont il voyait la photo dans les journaux et qui lui semblaient ressembler à sa mère puis, la nuit suivant leurs enterrements, il se rendait jusqu’au cimetière et il creusait leurs tombes dans un état second. Il ramenait alors leurs corps chez lui et il tannait leurs peaux dans le but d’en fabriquer divers accessoires. Ed Gein se souvenait s’être rendu ainsi plus de 40 fois dans les trois cimetières des environs entre 1947 et 1952, mais il affirmait qu’à maintes reprises il avait brusquement recouvré ses esprits et qu’il était reparti les mains vides. Il n’avait jamais eu des relations sexuelles avec les cadavres exhumés car:  » Ils sentaient trop mauvais « .
Il reconnaissait avoir pillé neuf tombes, et conduisit les enquêteurs jusqu’à leurs emplacements. La plupart des cercueils exhumés furent retrouvés vides, d’autres contenaient un pied de biche, et l’un d’entre eux renfermait un anneau et certaines parties d’un corps, ce qui corroborait sa confession.

L’arrestation d’Ed Gein

Ed Gein admit avec difficulté avoir tué Bernice Worden et Mary Hogan. Selon lui, ces meurtres étaient des accidents, il se trouvait dans un état second aux moments des faits et ne se souvenait d’aucun détail. Les restes épars d’une quinzaine de corps avaient été retrouvés disséminés un peu partout sur sa propriété et les enquêteurs étaient persuadés que Bernice Worden et Mary Hogan n’étaient pas ses seules victimes. Les noms de plusieurs jeunes filles disparues dans la région furent évoqués et leur disparition fut attribuée à Ed Gein. Il y avait également deux chasseurs qui pouvaient potentiellement être ses victimes mais aucun restes masculins n’avaient été retrouvés dans la maison, ce qui tendait à invalider cette thèse.
Ed Gein ne put être jugé. Les psychiatres chargés de son expertise le déclarèrent schizophrène et il fut interné au Waupan State Hospital. Son état fut attribué à la relation malsaine qu’il avait entretenue avec sa mère durant toute son enfance et son attirance pour celle-ci. Une fois adulte, l’attirance et la répulsion qu’il ressentait pour les femmes et la dualité de ses sentiments s’était peu à peu transformée en psychose.

Peu après, les biens d’Ed Gein furent mis aux enchères ce qui attira une foule de curieux. Les organisateurs de la vente avaient décidé de faire payer un demi-dollar pour la visite de la ferme mais il en découla de telles protestations qu’ils durent revenir sur leur décision et ouvrir ses portes gratuitement.
Le 20 mars 1958, les pompiers durent intervenir pour éteindre un incendie qui s’était déclaré dans l’ancienne ferme d’Ed Gein. Ils ne purent l’éteindre à temps et la maison fut réduite en cendres. Même si un incendie criminel fut fortement suspecté, aucune preuve ne permit d’en avoir la certitude.

Près de dix ans plus tard, en 1968, la justice estima Ed Gein sain d’esprit et qu’il fut déclaré apte à être jugé. Lors d’un procès qui commença le 7 novembre 1968, Ed Gein fut déclaré coupable de meurtre avec préméditation. Mais, comme il avait été jugé irresponsable au moment des faits, il fut acquitté et il regagna donc l’hôpital psychiatrique de Waupon.
Le shérif Art Schley mourut à 43 ans, peu avant le procès d’Ed Gein, d’une attaque cardiaque. Ses amis expliquèrent qu’il avait été traumatisé par l’horreur des crimes de Gein et que ces souvenirs et l’angoisse de devoir en parler lors du procès avaient causé sa mort.
En 1978, Ed fut transféré au Mendota Central Health Institute, où il rejoint le service gériatrique. Les médecins qui s’occupaient de lui le décrivaient comme un patient doux, calme et poli.
Edward Gein mourut d’insuffisance cardiaque et respiratoire en 1984, à l’âge de soixante dix-sept ans et il fut enterré dans le cimetière de Plainfield, tout près de sa mère. Edward Gein était devenu une légende et, par une étrange ironie, son lieu de sépulture fut régulièrement vandalisé, chacun tentant de ramener un morceau de sa tombe en souvenir. En l’an 2000 sa pierre tombale fut dérobée mais elle fut retrouvée l’année suivante et elle est, depuis, conservée dans les locaux de la justice.

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