Une Servante Pour Lucifer

La Possession de Kendra

Ed et Lorraine Warren, les deux célèbres enquêteurs du paranormal, donnaient une conférence dans un collège quand soudain Lorraine sentit une présence maléfique dans la salle. Habituellement, elle pouvait percevoir les auras sombres des satanistes et des adeptes de magie noire, mais ce jour-là, elle ne parvenait pas à distinguer la source des mauvaises vibrations. Une fois la séance de questions terminée, des spectateurs se présentèrent à eux pour discuter, comme ils le faisaient d’habitude, et deux groupes bien distincts se formèrent, certains se rassemblant autour d’Ed et d’autres autour de Lorraine. Quinze minutes plus tard, regardant vers son mari, Lorraine s’aperçut qu’il était en train de parler à un étudiant. Près de lui, se tenait une jeune fille qui, pour une raison quelconque, semblait bouillir de rage. Intriguée, Lorraine s’excusa auprès de ses interlocuteurs et elle se dirigea vers Ed qui lui expliqua brièvement l’histoire.

Jimmy, le jeune homme en question, était venu assister à leur conférence et il avait amené sa petite-amie Kendra avec lui car il la soupçonnait d’être sous influence occulte. Quand elle se mettait en colère, elle semblait brusquement envahie par une haine et une rage intense et ses traits se transformaient en quelque chose qui ressemblait à un loup. Même sa voix changeait, et d’une incroyable manière, il semblait à Jimmy qu’une personne différente parlait à sa place.

Ed discutait de la situation avec sa femme quand Kendra se jeta brusquement sur elle, tentant visiblement de la tuer. Terrifiés, les spectateurs s’éloignèrent précipitamment de l’estrade et Ed proposa aux deux jeunes gens d’aller discuter dans un endroit plus tranquille. Comme Lorraine avait été victime d’une agression et qu’elle en était encore bouleversée, il avait été décidé de la laisser à l’écart, afin d’éviter tout risque inutile. D’après Ed Warren:  » Dans la salle des coulisses, la jeune fille était totalement sous possession. Elle respirait lourdement alors que l’entité la possédait, la submergeant totalement d’une haine violente et intense. Les traits de son visage s’étaient également quelque peu transformés, prenant l’apparence d’un loup comme l’avait dit le garçon, et la voix avec laquelle parlait l’entité s’avérait être très différente de celle de la jeune fille. « 

Dix minutes plus tard la possession sembla se terminer mais Ed, qui n’en était vraiment certain, choisit de s’asseoir dans un coin opposé de la pièce et il attendit. Au bout d’un certain temps, comprenant qu’elle était redevenue elle-même, il lui raconta la scène à laquelle il venait d’assister et il observa sa réaction. Kendra lui expliqua qu’elle avait vaguement conscience de son état mais qu’elle perdait régulièrement la mémoire et qu’elle avait peur de perdre l’esprit. Au cours des trois derniers mois, la situation avait dramatiquement empiré. Il lui manquait des heures et même des jours entiers de sa vie. Ed lui expliqua que la perte de mémoire allait de pair avec la possession, car elle devait ne se souvenir de rien, et il rajouta qu’avant de faire quoi que ce soit, il fallait qu’il sache: pourquoi était-elle possédée?

Kendra, qui se doutait de la raison de sa possession, commença alors à lui raconter son histoire. Peu avant l’été, elle avait fait la connaissance de Jimmy, son séduisant petit-ami, alors qu’il était en vacances dans sa ville natale, et ils avaient eu quelques rendez-vous ensemble. A la fin de l’été, le garçon, qui suivait des études dans une ville voisine, était rentré chez lui et comme il n’éprouvait aucun sentiment pour elle, il avait ignoré ses diverses relances. La jeune femme, qui venait d’un milieu aisé et qui avait l’habitude d’obtenir tout ce qu’elle voulait, n’avait pas pu se résigner à voir Jimmy lui échapper ainsi. Elle en était folle, elle le voulait passionnément, aussi avait-elle tout essayé pour gagner son affection. Elle lui avait écrit des lettres, elle lui avait envoyé de l’argent pour qu’il puisse lui rendre visite, sans succès aucun. Frustrée, elle avait alors décidé de tenter quelque chose de radicalement différent et elle s’était rendue dans un magasin d’occultisme pour y acheter un livre de magie noire, qu’elle avait ramené chez elle. Une semaine plus tard, elle s’était livrée à un rituel visant à obtenir l’amour de Jimmy, un vieux rituel qui existait depuis des siècles et qui avait posé problème à tous ceux qui s’étaient risqués à l’essayer.

Aujourd’hui encore, le titre de l’ouvrage en question reste secret car Ed se refusait à le divulguer. S’il se montrait parfois réticent, tout comme sa femme, à donner des détails précis, tels que les noms des livres de magie, les rituels spécifiques utilisés par une personne, ou le nom des esprits responsables d’attaques démoniaques, il n’agissait pas ainsi sans raison:  » Je ne mentionne pas le nom des esprit, expliquait Ed, car connaitre un nom démoniaque en particulier équivaut à donner une reconnaissance à cette entité. Si vous lui donnez de la reconnaissance, même un tout petit peu, vous lui donnez du carburant pour se manifester. Les gens qui veulent savoir comment effectuer des rituels sataniques peuvent descendre à la bibliothèque locale. Mais je ne serai pas celui qui dira à ces gens comment voyager sur la route du non-retour. Mon travail est tout le contraire: aider les gens qui sont déjà allés trop loin, et dire à ceux qui voudraient se mêler d’occultisme: ne faites pas ça! « 

Suivant les indications de son grimoire, Kendra avait acheté une mantille de dentelle noire, qu’elle avait portée comme un voile de mariée funeste, le faisant tenir au sommet de son crâne grâce à une couronne de cornes de chèvres. Elle avait ensuite prononcé ses vœux, renonçant à Dieu et au baptême et jurant allégeance à Satan, avant de finaliser le rituel d’une tasse de sang animal. Un mois plus tard, Jimmy avait enfin commencé à s’intéresser à elle. Il l’avait tout d’abord appelée au téléphone puis il s’était mis à lui rendre visite tous les week-ends. Pour Kendra, tout se passait merveilleusement bien mais elle ignorait encore qu’elle avait une dette envers l’entité démoniaque qui était intervenue à sa demande. En effectuant un rituel de sorcellerie, elle lui avait donné l’autorisation d’entrer dans sa vie. D’ordinaire, la formule aurait dû attirer un incube ou une succube mais fort heureusement pour elle, un esprit démoniaque de moindre importance avait répondu à ses appels, qui était néanmoins parvenu à enflammer ses passions, la rendant vulnérable à ses impulsions. Il avait alors été en mesure de la posséder à volonté, ce qui expliquait ses trous de mémoire.

Jimmy, qui avait entendu toute l’histoire, semblait légèrement contrarié mais il ne fit aucun commentaire. Pensant que l’entité risquait de pousser la jeune fille au suicide, et qu’elle pouvait le faire à tout moment, Ed décida de prendre des dispositions pour qu’un exorcisme soit réalisé le plus rapidement possible. Il sortit dans le couloir pour expliquer la situation à sa femme et lui conseillant de prendre leur voiture de location et de rentrer à l’hôtel, il raccompagna Kendra chez elle. Il s’inquiétait tellement pour sa sécurité qu’il avait décidé de ne pas la laisser seule. Il passa donc la nuit dans son appartement, regardant de vieux films à la télévision en compagnie de Jimmy et la surveillant pendant qu’elle dormait dans sa chambre, porte ouverte et lumière allumée.

Le lendemain matin, Ed téléphona à un exorciste protestant qui officiait dans la ville, un homme qu’il connaissait bien et en qui il avait toute confiance. Il ne pouvait pas faire appel à un exorciste catholique car à l’époque, le clergé suivait strictement les directives du Vatican et les prêtres devaient s’astreindre à trois jours de jeune et de prières avant de procéder à un exorcisme. Il jugeait la situation de Kendra si sérieuse qu’il n’avait pas le temps d’attendre. Une heure plus tard, l’exorciste et son assistant, un pasteur des plus efficaces, se présentèrent au domicile de Kendra. Après leur avoir rapidement expliqué a situation, Ed demanda à la jeune fille de venir dans la pièce. Aucun des prêtres ne l’avait vue sous emprise démoniaque aussi devait-il, en premier lieu, leur prouver la possession. Le démonologue connaissait différentes méthodes pour obliger une entité diabolique à se révéler mais il en préférait une aux autres: placer discrètement un crucifix derrière la tête de la victime présumée et observer sa réaction. Il proposa cette expérience aux prêtres, qui donnèrent leur accord, puis l’exorciste demanda à Kendra de fermer les yeux et de compter lentement jusqu’à vingt. Son assistant, qui se tenait déjà derrière elle, plaça alors une croix de 15 centimètres derrière sa tête et aussitôt la créature maléfique se trahit, criant sauvagement:  » Enlève-moi ça! Ça brûle! Enlève-moi ça! « 

L’utilisation de la croix l’avait obligé à se montrer. Il admit qu’il était le seul à posséder le corps de la jeune fille et quand l’exorciste lui ordonna de s’identifier, il prétendit être un serviteur de Diane, un esprit d’oppression sexuelle connu sous le nom de la déesse de la chasse dans la mythologie. Cependant, malgré tous leurs efforts, il refusa d’en dire plus et, comme la plupart des esprits, il partit furieux, hurlant et maudissant les personnes présentes. Habituellement, une enquête officielle aurait dû être menée pour prouver la possession mais elle était tellement évidente que l’exorciste décida d’accomplir immédiatement le rituel. Selon Ed:  » Dans ce cas, l’exorciste a eu le dessus dès le début car la chose tremblait à toute mention de Dieu ou quand on la mettait en présence d’une croix ou d’eau bénite. Pourtant, l’entité qui la possédait était assez résistance lors de la lecture du rituel, qui a duré environ une heure. Pendant la cérémonie elle n’arrêtait pas de hurler Kendra est mienne, elle est mienne. Son âme est mienne. L’esprit a été exorcisé de la jeune fille le jour même, mais avant de partir, il a promis qu’il reviendrait. Aucun de nous n’avait la moindre idée de ce que l’esprit avait en tête. Mais j’allais être le premier à le découvrir. « 

Le Retour

Le Musée de l’Occulte des Warren

Une fois l’exorcisme terminé, Kendra fut officiellement délivrée de son esclavage. Elle remit à Ed son voile de dentelle noire, sa couronne de cornes de chèvres, la coupe et le grimoire, de peur d’être tentée, ou obligée, de les utiliser à nouveau. Lorraine passa chercher Ed à l’appartement de la jeune fille, et ils ramenèrent les objets chez eux, afin de les mettre en sécurité. Malheureusement, l’esprit semblait toujours hanter les objets, comme le découvrit Ed:  » Dès le premier jour, l’attirail de sorcellerie m’a fait du mal. Une présence me suivait partout. Puis, la nuit suivante, après le coucher du soleil, un froid psychique a envahi le bureau et le Musée de l’Occulte, où j’avais mis les objets. Sentant le changement de température, je me suis levé de mon bureau et j’ai regardé dans le musée. Là où se trouvaient le voile et les cornes, j’ai aperçu une masse brumeuse gris foncé de la taille d’un homme se transformer en une brume noire dense. Afin d’éviter que la chose ne se manifeste, j’ai utilisé de l’eau bénite pour la refouler dans l’invisible. Il était évident que l’entité qui possédait Kendra avait voyagé avec les objets profanes. « 

Le lendemain, Ed reçut un appel téléphonique de Robert Goldstrom, qui lui demandait s’il pouvait passer le voir avec sa fille Denise.  » Pourquoi avez-vous besoin de me voir?  » lui demanda Ed. L’homme, qui semblait en colère, lui expliqua alors que sa fille semblait posséder une connaissance naturelle de tout ce qui touchait à la sorcellerie. Il lui fit alors un portrait rapide de la vie de Denise qui, lorsqu’elle était petite fille, ne jouait pas comme les autres enfants de son âge mais passait son temps à réinventer des rituels de magie noire complexes, lesquels impliquaient des pentagrammes, le sang d’animaux etc… Elle connaissait des formules si complexes qu’un adepte de la sorcellerie aguerri ne les aurait pas sues.

La fillette avait grandi et les choses s’étaient aggravées. Elle faisait preuve d’une aversion explicite envers l’église et elle fuyait immédiatement dès que se présentaient des membres du clergé. Les enfants du quartier avaient instinctivement peur d’elle, et même sa propre mère appréhendait de rester seule dans une pièce avec elle. Quand Denise était devenue adolescence, elle s’était montrée plus mauvaise encore. Dès qu’elle regardait les gens, et même s’ils ignoraient tout d’elle, elle remplissait leurs esprits d’une terreur inhumaine. Le regard de la jeune fille était si intense qu’elle pouvait arrêter une machine juste en la fixant. Son père l’avait vue le faire. A une occasion, elle avait brusquement arrêté une voiture qui roulait sur l’autoroute, la rendant aussi immobile qu’une pierre.

Ces informations étaient déjà inquiétantes mais M. Goldstrom avait appelé Ed pour quelque chose de bien plus grave. Depuis quelques temps, Denise présentait des personnalités différentes, parfois des hommes, parfois des femmes, et d’autres qui ne semblaient même pas humaines. Les déclarations de ces  personnalités étaient extrêmement menaçantes, aussi bien pour lui que pour sa femme. Au début, soupçonnant quelque problème psychologique, il l’avait amenée voir un psychiatre, mais ce dernier lui avait dit que son problème semblait dépasser le cadre de la psychiatrie. Le  médecin lui avait conseillé de montrer sa fille à un membre du clergé, mais le prêtre qu’il avait consulté avait refusé de la voir avant que le célèbre démonologue Ed Warren n’ait donné son avis.

Après avoir écouté cette effrayante histoire, Ed donna rendez-vous à M. Goldstrom et à sa fille Denise pour le samedi suivant, à onze heures. Cette nuit-là, l’esprit tenta de se manifester une nouvelle fois dans le Musée de l’Occulte, et il le remit à sa place en faisant  » son truc avec de l’eau bénite,  » comme il le décrivait lui-même. Le lendemain, qui était un lundi, Lorraine et Ed partirent en Pennsylvanie et dans l’Ohio où ils avaient des engagements, ne revenant chez eux que le vendredi soir.

Le jour venu, à onze heures du matin, Robert Goldstrom se présenta au domicile des Warren avec sa fille Denise, qui avait environ dix-neuf ans. Elle était grande, mince, brune, et ses yeux bleus lui donnaient un regard féroce et pénétrant. Quand Ed essaya de lui serrer la main, elle eut un brusque mouvement de recul et le regarda avec méfiance. Elle semblait épier le moindre de ses gestes. Ed amena ses deux visiteurs jusqu’à son bureau, puis, une fois tout le monde installé, il alluma son magnétophone et demanda à M. Goldstrom de lui raconter son histoire une nouvelle fois. Le père se soumit à sa demande, rajoutant que lorsqu’ils parlaient à leur fille, ni sa femme ni lui n’étaient jamais vraiment sûrs de s’adresser à elle. Immobile, Denise garda le silence, scrutant Ed en permanence. Une fois le récit terminé, Ed se tourna vers la jeune fille et il commença à la questionner:

– Qui êtes-vous? demanda-t-il.
– Denise Goldstrom, lui répondit-elle avec mépris.
– Quel âge avez-vous?
– Je suis plus vieille que ce que vous pensez, dit-elle.
– Que diriez-vous de ce que votre père m’a raconté? Est-il vrai que vous manifestez des personnalités différentes?
– Il est paranoïaque, répondit-elle. Je suis moi-même. Je suis qui je veux être.
– Avez-vous des personnalités inhumaines?
– Je n’ai pas à répondre à vos putains de questions! lui rétorqua-t-elle.

Quand Ed leva les yeux sur Denise pour lui poser une autre question, il s’aperçut qu’elle le fixait de son regard perçant.  » Vous avez choisi le mauvais gars pour essayer ça, lui dit-il. Ne me refaites jamais, jamais ça!  » Pour la première fois depuis qu’elle était entrée dans la maison, la jeune fille détourna les yeux. Elle semblait abasourdie et désorientée, comme si elle avait été frappée avec une batte de baseball. Elle parcourut les différents objets posés sur le bureau, et son regard s’arrêta sur le voile de dentelle noire que le démonologue avait décidé de garder près de lui, espérant ainsi empêcher l’esprit qui y était attaché de se manifester. Soudain, avant qu’il ne puisse réagir, Denise se leva, elle saisit rapidement le voile et le serra contre sa poitrine. Les traits de cette fille ravissante commencèrent alors à se transformer en ceux d’une créature sauvage et ricanante. Un démon inférieur la possédait. Ed s’empara rapidement de deux flacons d’eau, un flacon d’eau du robinet et un autre d’une eau bénie, puis il s’éloigna de la créature inhumaine autant qu’il le pouvait et un rire diabolique éclata dans la pièce.

– Tu ries de moi, dit Ed. Mais à qui suis-je en train de parler?
– Je sais qui vous êtes! Ah, ah, ah, ah, heee… (rires)
– Qui es-tu? demanda-t-il.
– Tu ne me reconnais pas? Ah! Tu ne me connais pas? Oh, allez, tu sais qui je suis. Ne sais-tu pas qui je suis? Je souffre! Je souffre!
– Pourquoi souffres-tu?
– Ho, ho, heee… Le noir est ma couleur. C’est la couleur de la mort, la couleur de la mort! La couleur de la mort!
– Qui t’a envoyé ici?
– J’adore Diane et Lucifer. Et la lumière, la lumière, la lumière! Tout ce qui est saint est damné!
– J’ai quelque chose pour toi, lui annonça alors Ed.
– Que pourrais-tu avoir pour moi que je ne possède déjà? lui répondit alors l’entité d’un air de défi. Je peux posséder n’importe qui, b……
– Je vais le mettre dans ta main et tu me diras ce que c’est.

Cherchant à tester l’entité, Ed jeta alors un peu d’eau du robinet  sur le bras de Denise.
– Oooooh. C’est humide!
– C’est vrai.
– C’est humide et je n’aime pas ça. J’aime mettre de la graisse humaine sur mon corps. Et j’aime le sang. Et j’aime voir le sang. Et j’aime boire du sang.
– J’ai quelque chose d’autre pour toi. J’ai de l’eau bénite pour toi.
– De l’eau bénite? Saint-quoi? Toi?… Tu n’es pas un homme de Dieu!
– Non, je ne le suis pas.
– Tu es entre les deux, n’est-ce pas?
– C’est vrai, entre les deux.
– Tu ne sais pas! Il reste en enfer ou au paradis. Et il n’y a pas d’enfer, et il n’y a pas de paradis. Non, il n’y a pas d’enfer, et il n’y a pas de paradis. Il y a juste un endroit et je ne vous dirai pas où se trouve cet endroit. Maintenant, vais-je le faire? Tu le sais n’est-ce pas? Tu le sais. Tu es debout entre le ciel et l’enfer. Et il n’y a pas de paradis et d’enfer. Mais tu vas y aller!
– Non, tu es celui qui va y aller.

Un rire diabolique retentit alors pendant dix secondes.
– J’aime ça. Tu sais quoi? Ça me donne la paix. L’esprit se mit alors à pleurer.
– Ça me donne la paix, et j’aime la paix. J’aime la paix et être tranquille. Mais je ne t’aime pas! hurla-t-il.
– Et je sais pourquoi tu ne m’aimes pas.
– Pourquoi?, demanda l’esprit, poussant un cri de colère.
– Tu n’as plus Kendra à posséder, n’est-ce-pas?
– J’ai toute personne que je veux avoir. Je suis plus fort que toi et ton homme de Dieu.
– Nous verrons. Nous allons voir qui est le plus fort. Quel est ton nom? Comment t’appelles-tu toi-même?
– Laisse-moi te répondre de cette manière, c…… Je suis le favori de Lucifer. Sais-tu qui est Lucifer?
– Dis-le moi, qui est Lucifer?
– Ah, ah, ah, ah. Il est le seul dieu qui a raison! Sais-tu que quand je veux quelque chose, je peux l’avoir?

L’esprit se mit alors à fanfaronner:
– Je peux avoir ce que je veux!
– Tu voulais Kendra, mais tu n’as pas pu la garder.
– Ho, ho, ho. Kendra ne sait pas! Kendra ne sait pas!
– Que ne sait-elle pas?
– Elle boira le sang! Elle boira le sang! Et elle me reverra! Je la posséderai à nouveau!
– A nouveau?
– A nouveau, répondit l’esprit, catégorique.
– Non, elle ne le sera pas, dit Ed.
– Et par quels moyens allez-vous protéger cette fille? Elle est à moi! Son âme est à moi! cria la chose.
– Rien d’elle ne t’appartient.
– Je lui sucerai le sang!
– Tu ne lui feras rien!
– Ah, Ah! Je l’aime. Elle est mon jouet, roucoula-t-il.
– Elle était ton jouet, jusqu’à ce qu’elle vienne à moi. Mais tu aimerais la reprendre, même avec moi, n’est-ce pas?

L’esprit se mit alors à rire:
– Je peux faire tout ce que je veux!
– Tu ne feras rien! lui affirma Ed Warren. J’ai quelque chose (l’eau bénite) qui est plus fort que tu ne le seras jamais. Tu sais cela aussi, n’est-ce pas?
– Je voudrais vous tuer, et je le pense vraiment. (Crissement inintelligible). Vas-tu planter quelque chose dans mon cœur? Je n’ai pas de cœur!
– C’est vrai, tu n’as pas de cœur.
– Non.
– Mais je vais te donner autre chose, déclara Ed, jetant l’eau bénite sur la possédée. Tu n’aimes pas beaucoup ça, n’est-ce pas?
– Non!!, hurla l’entité.
– Aimes-tu le signe de la croix?
– Non!
– Très bien, maintenant, je vais te dire quelque chose…

L’esprit se mit alors à crier violemment.
– Je veux que tu partes, lui ordonna Ed. Et que tu ne reviennes jamais ici!
– Arrête!
– Non, je n’arrêterai pas. Au nom de Dieu, tu vas quitter…
– Au non de Jésus Christ, tais-toi! hurla alors la maléfique créature.
– Ce sera au nom de Jésus christ! Tu vas partir et tu ne reviendras jamais!
– Je reviendrai! Ou, si je ne reviens pas, un plus fort le fera! Je suis faible, mais d’autres sont plus forts!
– Tu es faible, tu partiras, et je te ferai partir. Au nom de Dieu, je vais te faire partir.
– Ha, ha, ha, ha, ha, heeee…
– Voici quelque chose pour toi, réfléchis-y. Ed jeta alors de l’eau bénite sur le corps de Denise en traçant un signe de la croix.
– Oh, mon Dieu, le feu! Feu, feu, feu!, gémit alors l’entité dans un crissement.
– Je ne veux plus que tu reviennes dans cette maison. Tu me comprends?
– Oh, mon Dieu. Oh, mon Dieu. Oh, mon Dieu. Oh…
– Je veux que tu ne reviennes jamais dans cette maison! Maintenant pars! Pars!

Un concert de gémissements funestes, de miaulement et de cris d’animaux retentit brusquement dans la pièce, s’éloignant alors que l’entité se retirait du corps de Denise. Les traits de son visage revinrent alors à la normale et elle sembla se calmer.

L’incident avait indiqué à Ed que la jeune fille était un récipient ouvert à la possession, qui pouvait montrer différents visages, dont certains n’étaient pas humains. Denise servait de moyen de communication entre les démons et les humains. Pendant toute leur conversation, il dut régulièrement l’asperger d’eau bénite pour lui permettre de poursuivre ses explications. Elle était depuis longtemps impliquée dans la sorcellerie et l’occulte, et ses pratiques semblaient remonter bien au-delà de sa vie actuelle. Denise était une sorcière naturelle. Personne ne lui avait jamais dit ce qu’il fallait faire, elle ne l’avait pas lu dans un livre, elle était née avec ce savoir, qui lui venait de ses anciennes vies. Les connaissances acquises lors des vies précédentes ne s’oublient jamais, surtout les maléfiques. Elle était un cas vraiment difficile, qui relevait du vrai démon dont la plupart des gens ignorent tout. Pour Ed:  » Denise était un instrument du démon. En d’autres termes, elle n’existait que comme porte-parole virtuel pour des esprits démoniaques. Cependant, elle n’était pas une sorcière. La puissance de la sorcellerie vient du vœu de servir le diable. Elle était plutôt une mage noire. La magie noire est semblable à la sorcellerie mais pas tout à fait. La sorcellerie est la capacité à manipuler le monde physique grâce à un arrangement avec des esprits. Cette fille était dans la même équipe que les esprits inhumains négatifs. Elle avait conclu un arrangement dans une incarnation précédente. Elle pouvait en parler en connaissance de cause et dans les moindres détails. « 

Ed croyait en la réincarnation, mais en certaines circonstances:  » Je ne peux pas vous affirmer que la réincarnation est un principe ou un processus que tous les gens subissent naturellement. Je peux juste vous dire que j’ai des dossiers qui prouvent que certaines personnes ont vécu plus d’une vie. Mais je n’ai aucune information qui certifie que tous les gens subissent le même phénomène. En outre, lorsque le démoniaque est impliqué dans une situation, vous devez composer avec des perturbations de l’ordre naturel. Par conséquent, une personne qui fait un pacte avec un démon et qui expérimente une renaissance dans une autre vie le fait dans des circonstances douteuses. Cette durée supplémentaire de vie pourrait, à un certain degré, être considérée comme une fausse incarnation. « 

Denise était un réceptacle pour les entités démoniaques mais elle ne parvenait pas à les commander et elle avait accepté de rencontrer Ed Warren pour cette raison. Connaissant sa réputation, elle était venue dans son bureau en s’imaginant, à tort, qu’elle pourrait l’obliger d’une quelconque façon à lui révéler certains secrets qu’elle ne maîtrisait pas encore. Bien évidemment, le démonologue avait refusé de lui apprendre quoi que ce soit:  » Donner à cette fille la connaissance mystique aurait été comme mettre une grenade dans la main d’un petit enfant.  » Au cours du mois suivant, Ed rencontra Denise et son père à trois reprises, sans qu’il ne puisse rien faire pour les aider. Il remit à M. Goldstrom une lettre de référence à présenter à l’ecclésiastique, lui expliquant que Denise avait besoin de conseils d’ordre religieux. Sa vie, si elle ne jugeait pas bon d’en changer, serait forcément consacrée aux forces occultes. Elle vivrait et mourrait sous leurs influences maléfiques.

Une semaine après l’exorcisme de Kendra, Jimmy, son petit ami, appela Ed au téléphone. La jeune fille avait bu du sang et, juste comme l’esprit l’avait annoncé, elle était tombée une nouvelle fois sous son emprise. Ed dut alors repartir pour l’université, affronter l’entité et organiser pour Kendra un nouvel exorcisme. Apparemment, elle n’aurait pas recommencé par la suite. Sa mantille de dentelle, sa couronne de cornes de chèvres, sa coupe et son livre de démonologie se trouvent toujours exposés au Musée de l’Occulte. Quand à Denise, ce qu’il advint d’elle par la suite, nul ne le sait…

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