Arrière Satan !

Arrière Satan! (Begone Satan!) est le nom d’un petit livret écrit par un prêtre allemand, le Père Carl Vogl, en 1928. Il raconte l’histoire d’Anna Ecklund, dont l’exorcisme par le Père Theophilus Riesinger est le plus célèbre des États-Unis. Étrangement, le récit original est difficilement trouvable et il n’existe que très peu de livres traitant de cette affaire. Il a été traduit en anglais par le révérend Celestine Kapsner, et publié en 1935. Begone Satan! était à l’origine une épaisse brochure qui était distribuée aux séminaristes américains afin de les familiariser aux pouvoirs destructeurs du diable. Suivant les versions, sa préface ou ses introductions, sa longueur variait de 32 à 48 pages, mais l’histoire restait la même.

 Cas Récent de possession et d’exorcisme à Earling, Iowa

En 1928, le Père Theophilus Riesinger, qui était en mission dans l’Iowa, demanda au Père Steiger, le révérend de la petite ville d’Earling, la permission d’effectuer un exorcisme au couvent des Sœurs Franciscaines de sa paroisse, mais ce dernier ne se montra guère enthousiaste.

— Quoi, un autre cas de possession? lui répondit le pasteur. Est-ce que ces affaires continuent d’augmenter? Vous avez déjà chassé le diable d’un certain nombre d’entre eux!
— Cela est vrai. Cependant, l’évêque m’a de nouveau remis un cas entre les mains. La dame en question vit à quelque distance d’Earling. Je voudrais l’amener ici, car cela créerait trop d’excitation dans sa maison et peut-être serait-ce même la cause de nombreuses perturbations pour la personne elle-même.
— Mais pourquoi ici, dans ma propre paroisse?
— C’est justement ici, dans cet endroit paisible, que l’affaire peut être tranquillement réglée. Deux places sont disponibles, soit dans le couvent des Sœurs, soit dans la sacristie. Il est donc tout à fait possible de soulager la malheureuse de son fardeau sans que personne n’en prenne connaissance.
— Mon cher Père, pensez-vous que la Mère Supérieure permettrait que quelque chose comme ça ait lieu sous le toit de son couvent? Je ne le crois pas. Et il est tout à fait hors de question d’amener la personne dans ma propre maison.
— Mon cher ami, dites-moi une chose, répondit le Père en souriant. Me donnerez-vous votre approbation si la Mère Supérieure y consent?
— Eh bien, très bien, mais seulement sous cette condition. Je ne crois pas que vous obtiendrez l’autorisation du couvent.
— Merci pour votre permission. L’affaire est donc réglée, car la Mère Supérieure m’a déjà donné son consentement. J’ai déjà pris toutes les dispositions avec elle pour régler cette affaire, il me manquait juste vote accord. « 

Ainsi fut-il convenu de pratiquer l’exorcisme au couvent. L’endroit était situé dans l’arrière pays, et comme beaucoup de gens étaient occupés dans leurs champs en cet été ensoleillé, le Père pensait que le rituel pourrait s’effectuer dans la plus grande discrétion. Enfin de se prémunir de toute critique, le cas fut soumis une nouvelle fois à l’évêque, qui appela le pasteur pour en discuter avec lui.

— Donc, mon Père, vous avez donné votre accord pour permettre que cela se produise dans votre paroisse. Avez-vous suffisamment réfléchi à la question?
— Votre Seigneurie, pour être honnête, je dois avouer que je n’en avais pas trop envie. J’éprouve une forte aversion pour toutes ces affaires inhabituelles. Mais le Père Theophilus m’a expliqué que ma paroisse, avec son accès facile au couvent, était particulièrement appropriée pour une telle entreprise, et je n’ai pas eu le cœur de le lui refuser.
— En tant qu’évêque, je tiens à vous mettre en garde qu’il risque d’y avoir de très graves conséquences pour vous. Si le Révérend Père ne vous a pas éclairé en ce qui concerne la question, alors je tiens à vous donner des informations basées sur des faits solides et des expériences similaires. Le diable va certainement essayer de se venger sur vous lorsque cette malheureuse femme sera libérée de cette terrible oppression et vous devrez faire attention.
—  Et bien, j’ai du mal à croire que cela puisse être aussi terrible que ce que vous suggérez. La main de Dieu me protégera. Le diable n’a pas plus d’influence que Dieu ne le permet. Et si Dieu ne le permet pas, alors il ne sera pas en mesure de me nuire. Aussi, n’ai-je aucun doute, je vais tenir ma parole. J’ai donné mon consentement et je ne veux pas le retirer. Et cela devrait-il entrainer des sacrifices, que je serais trop heureux de les supporter, si grâce à cela une âme immortelle est libérée de l’emprise terrible de cet être infernal. « 

La Dame

Le Père Steiger ne connaissait pas la possédée, qui vivait loin de Earling, et il n’avait jamais entendu de rumeurs à son sujet. Le père capucin lui avait expliqué qu’Anna Ecklund était née en 1882, qu’elle était une femme respectable, très pieuse, qui s’était montrée irréprochable tout au long de son enfance. Mais brusquement, au cours de sa quatorzième année, les choses avaient changé. Au début, le phénomène n’était pas constant, mais quand elle voulait aller à l’église, recevoir la Sainte Communion ou simplement prier, alors certaines forces s’y opposaient. Puis la situation avait dégénéré et aucun mot ne pouvait exprimer le calvaire qu’elle avait subi. Certaines voix sinistres avaient commencé à s’insinuer en elle, lui susurrant les plus ignobles des pensées, ce qui l’avait poussée à faire des choses inavouables. Désespérée, la jeune fille croyait qu’elle devenait folle. Elle montrait un intérêt quasi obsessionnel pour tout ce qui se rapportait au sexe, et souvent les voix l’incitaient à s’en prendre à la maison de Dieu. Il y avait, par exemple, des moments où la force la poussait à briser le bénitier, à attaquer son conseiller spirituel ou même à l’étouffer.

Hallucinations, hystérie pure, crise nerveuse. Bien évidemment, ces explications faciles pouvaient s’appliquer à de telles expériences mais de nombreux médecins s’étaient occupés d’Anna pendant des années, elle avait consulté les meilleurs spécialistes, et leurs examens approfondis les avaient tous amenés à la même conclusion: Anna ne présentait pas le moindre signe de nervosité, elle était même tout à fait normale, dans son sens le plus large. Comme ses expériences inhabituelles ne pouvaient être attribuées à un problème mental ou physique, elle ne présentait aucun symptôme de maladie ou de dérèglement organique, les médecins s’étaient montrés impuissants et Anna avait continué à vivre avec ses problèmes.

De nombreuses années s’étaient écoulées. Anna avait fini par se tourner vers l’église, mais en raison d’un certain scepticisme, les autorités religieuses s’étaient montrées réticentes à pratiquer un exorcisme. Cependant, grâce aux examens et aux observations qui étaient pratiqués en permanence, il était progressivement devenu évident que des pouvoirs surnaturels étaient en œuvre. La jeune femme comprenait des langues qu’elle n’avait jamais entendues ni lues. Quand le prêtre la baptisait en latin, sa bouche se remplissait de mousse et elle devenait folle furieuse, mais s’il parlait latin sans se référer aux choses sacrées, alors elle restait stoïque. Elle pouvait détecter les objets qui avaient été aspergés d’eau bénite, ou bénis en secret, et ils lui inspiraient les plus atroces répulsions alors que les choses ordinaires la laissaient parfaitement indifférente.

Après des années de procédure, Anna venait d’atteindre les quarante ans, les autorités ecclésiastiques étaient convaincues de se trouver face à un cas évident de possession démoniaque et elles pensaient qu’elles devaient intervenir pour délivrer la jeune femme du mal. Sur le moment, la cause de la possession ne put être établie, la malheureuse ignorant ce qui lui valait cette malédiction, et il allait falloir attendre l’exorcisme solennel pour la connaitre. Le Père Theophilus était familier des cas de possession, il avait déjà chassé le malin à de nombreuses reprises, aussi l’évêque décida-t-il de lui confier cette affaire. Le capucin était en pleine santé à l’aube de sa soixantième année, mais il ignorait que ce combat allait le mener aux limites de son endurance physique.

Le Moment Décisif

Père Steiger

Le jour venu, outre le Père Steiger, sa sœur, qui était également sa femme de ménage, et les Sœurs vénérables, personne n’était au courant de l’exorcisme qui allait être tenté. Ce secret avait été décidé à l’avance, et le principal objectif était de protéger Anna des commérages. Les autorités religieuses craignaient, si quelque chose venait à se savoir, que les gens la désignent comme la femme possédée par le diable. Pour amener Anna au couvent, il avait été décidé de lui faire prendre le train et, songeant qu’il pouvait arriver quelque chose sur le chemin, le personnel ferroviaire avait été prévenu. Cette mise en garde ne fut pas vaine car durant tout le trajet, Anna se montra ingérable et leur aide fut précieuse. En arrivant à la station d’Earling, elle était dans un tel état de rage qu’elle n’avait qu’une envie, sauter sur les sœurs qui l’attendaient et les étrangler.

Le Père Steiger possédait sa propre automobile, et il devait rencontrer Père Theophilus à la gare. Mais inexplicablement, bien que sa nouvelle voiture soit en parfait état, de tout le trajet elle ne voulut pas avancer et il lui fallut deux heures pour rejoindre le lieu de rendez-vous. Bien évidemment, le prêtre s’excusa pour son retard et le Père Theophilus lui répondit très calmement:  » Mon cher ami, je n’en suis point offensé. J’aurais même été surpris si tout s’était déroulé sans heurt. Des difficultés vont surgir, on doit s’attendre à ce qu’elles se produisent. Le diable essaie de son mieux de déjouer nos plans. En attendant, j’ai prié sans cesse pour que le démon ne soit pas capable de vous faire du mal, car je pensais qu’il allait essayer d’interférer avec votre venue et qu’il pouvait tenter de vous blesser personnellement. « 

Maintenant que le Père Steiger avait compris pourquoi son automobile se montrait si capricieuse, il s’en méfiait. Il la bénit d’un signe de la Croix, puis il s’assit à l’arrière et durant le court trajet qui menait au presbytère, il récita silencieusement son chapelet, de peur que quelque chose ne se produise. Fort heureusement, les deux prêtres réussirent à gagner le presbytère sans la moindre difficulté. Anna, de son côté, était arrivée au couvent des Sœurs, où elle était en sécurité. Les hommes de Dieu pensaient que le combat commencerait le lendemain, mais le soir même, l’ennemi afficha ses vraies couleurs. La nouvelle parvint rapidement au presbytère qu’Anna causait des difficultés au couvent. Une sœur bien intentionnée avait aspergé d’eau bénite la nourriture destinée à leur invitée mais le diable ne s’y était point trompé et à peine avait-elle vu son souper qu’Anna était rentrée dans une colère folle. Consciente de la présence d’eau bénite, elle s’était mise à ronronner comme un chat et il avait été absolument impossible de la faire manger. Le plateau avait été ramené en cuisine, où des sœurs avaient changé les aliments bénis contre d’autres. Quand la malheureuse se trouvait en présence d’un objet béni ou consacré, elle ressentait alors d’intenses souffrances, comme si son corps se trouvait brusquement enfermé dans un charbon incandescent.

Le matin du premier jour, tout était calme. Le pasteur et le missionnaire avaient célébré la messe dans l’église de la paroisse puis ils s’étaient dirigés vers le couvent où une grande salle avait été préparée pour l’exorcisme. Ils ignoraient combien de temps durerait le combat mais sachant que Satan n’abandonnerait pas sa victime sans se battre, ils s’attendaient à plusieurs jours de lutte. La possédée les attendait, allongée sur le matelas d’un lit en fer. Ses bras de chemise et sa robe avaient été étroitement liés, de manière à éviter toute mauvaise surprise, et les plus robustes des religieuses avaient été choisies pour la maintenir sur son lit, si cela s’avérait nécessaire.

Anna sombra dans l’inconscience dès les premières prières et elle resta dans cet état durant tout le rituel. Ses yeux étaient si étroitement fermés que rien ne pouvait les ouvrir. Mais à peine le Père Theophilus commença-t-il à réciter la formule d’exorcisme que soudain, une scène terrifiante se produisit. Échappant aux mains de ses gardiennes le corps de la possédée sortit de son lit à une vitesse stupéfiante, et traversant les airs, il atterrit au-dessus de la porte de la chambre. Alors que toutes les personnes présentes, frappées d’effroi, contemplaient la scène, le Père Theophilus demanda calmement:  » Descendez-la! Elle doit être ramenée à sa place sur le lit!  » La malheureuse était restée mystérieusement suspendue au mur, sans aucune prise à laquelle s’accrocher, et les sœurs durent tirer de toutes leurs forces sur ses pieds pour la faire descendre de sa haute position.

Anna avait été replacée sur le matelas et pour éviter tout nouvel exploit, des sœurs la maintenaient fermement. L’exorciste reprit le rituel où il s’était arrêté mais très vite, une voix aiguë et puissante déchira l’air. La voix semblait venir de loin, de quelque part dans le désert. Satan hurlait comme s’il était frappé, et ce hurlement était semblable à celui d’une meute de bêtes sauvages. Soudain, les sons semblèrent émaner de la femme possédée, et les personnes présentes furent frappées d’une peur si intense qu’elle pénétra jusqu’à la moelle de leurs os.  » Silence, Satan. Tiens-toi tranquille, toi, l’infâme réprouvé!  » lui ordonna alors le Père Theophilus. Mais la créature continua à crier d’une telle manière que malgré les fenêtres fermées, ses hurlements résonnèrent dans tout le quartier. Affolés, des gens arrivèrent en courant d’ici et là, et aussitôt ils demandèrent:  » Qu’est-ce qui se passe? Quelqu’un est assassiné au couvent? « 

Alors, la nouvelle voyagea à travers toute la paroisse comme un feu de prairie: au couvent, se trouvait un possédé dont ils essayaient de chasser le diable. Les gens étaient pétrifiés de peur lorsqu’ils s’approchaient de l’édifice et qu’ils entendaient de leurs propres oreilles les cris des mauvais esprits. Les plus faibles s’enfuyaient, incapables de supporter la rage qui s’en dégageait.

A l’intérieur, c’était pire encore. Les membres du corps de la possédée se tordaient et se déformaient complétement, ce qui était un spectacle insupportable pour tous ceux qui assistaient à l’exorcisme. Les sœurs, et même le pasteur, ne pouvaient plus le tolérer. Souvent ils quittaient la pièce pour aller respirer l’air frais et recouvrer quelques forces. De son côté, le Père Theophilus ne faiblissait pas. Il avait été habitué aux hurlements de Satan et à ses manifestations lors de ses précédents exorcismes et il possédait les qualités nécessaires pour faire face à de telles épreuves. Lors des rituels d’exorcisme, il portait une hostie consacrée dans un ciboire sur sa poitrine qui le protégeait des blessures et des attaques du mal. A plusieurs reprises durant la cérémonie, il se mit à trembler, flottant comme une feuille prise dans un tourbillon de vent.

Un ou Plusieurs Démons

Différentes voix émanaient d’Anna, semblant indiquer que plusieurs esprits la possédaient. Certaines étaient bestiales, surnaturelles, et elles exprimaient tant de douleur et de haine qu’aucun être humain n’aurait pu les reproduire. D’autres sonnaient comme des voix humaines, et elles semblaient emplies de souffrance et d’amertume.
Lorsque le Père Theophilus demanda à Satan s’il y avait plusieurs esprits impliqués dans la possession, le démon admit avec vantardise qu’un certain nombre d’entre eux étaient présents. Puis, dès que le nom de Jésus fut mentionné, la bouche de la femme se remplit de mousse et elle se mit à hurler comme un animal sauvage. A partir de ce moment-là, tous les jours, d’atroces beuglements se firent entendre, et parfois, ils duraient pendant des heures. A certaines occasions il semblait que des hordes de lions et de hyènes étaient lâchées, puis venaient des miaulements de chats, le mugissement de bétail ou des aboiements de chiens. Ou alors, les cris de tous les animaux résonnaient en même temps. Ce vacarme épuisait nerveusement les douze religieuses qui secondaient en alternance le Père Theophilus.

— Au nom de Jésus et de sa Mère très sainte, Marie l’Immaculée, qui a écrasé la tête du serpent, dis-moi la vérité, quel est le chef ou le prince parmi vous. Quel est ton nom?? demanda l’exorciste.
— Belzébuth, répondit le diable, aboyant comme le chien de l’enfer.
— Tu t’appelles Belzébuth, mais n’es-tu pas Lucifer, le prince des démons?
— Non, pas le prince, le chef, mais l’un des leaders.
— Pourquoi t’appelles-tu Belzébuth si tu n’es pas le prince des démons?
— Assez, mon nom est Belzébuth. Es-tu un théologien compétent? ricana le démon.
— Depuis combien de temps tortures-tu cette pauvre femme?
— Depuis sa quatorzième année.
– Comment oses-tu entrer dans une jeune fille innocente et la torturer comme ça?
— Ha, son propre père ne nous a-t-il pas invités à la posséder en la maudissant?
— Mais pourquoi, toi Belzébuth, as-tu pris possession d’elle? Qui t’a donné l’autorisation?
— Ne parle pas si sottement… Ne dois-je pas obéir à Satan?
— Alors tu es ici sous sa direction et à sa demande?
— Eh bien, comment pourrait-il en être autrement?

Le Père Theophilus s’adressait au diable en anglais, en allemand et en latin et ce dernier, tout comme les autres démons, répondait correctement dans la même langue. Parfois, il arrivait que l’exorciste, épuisé, fasse de légères fautes de prononciation dans ses prières en latin et aussitôt, Belzébuth l’interrompait, le corrigeant et le traitant d’idiot. Une fois, alors que le diable marmonnait, le Père Theophilus ne parvint pas à décrypter ses mots. Il demanda alors au pasteur mais le prêtre n’ayant pas plus saisit, l’exorciste se tourna vers les religieuses et leur demanda ce qu’il avait dit. L’une d’elle lui répéta alors ce qu’elle avait cru entendre et aussitôt le diable se mit à hurler, puis, pointant du doigt la sœur il glapit:  » Toi, je n’ai pas dit ça! Tiens-toi en à la vérité! « 

Le Père Theophilus se demandait pourquoi le père d’Anna avait maudit sa propre fille mais à cette question il ne reçut qu’une réponse laconique:

— Vous pouvez le lui demander. Laissez-moi en paix, pour une fois.
— Alors, est-ce que le père d’Anna est présent parmi les démons? Et si oui depuis quand?
— Quelle question idiote… Il est avec nous depuis qu’il a été condamné. Une ribambelle de ricanements s’en suivit, pleins de joie maligne.
— Alors, je vous ordonne solennellement au nom du Sauveur crucifié de Nazareth de me présenter le père de cette femme et qu’il me donne une réponse! Une voix rauque, profonde, qui s’était déjà fait remarquer aux côtés de la voix de Belzébuth, se fit alors entendre.
— Es-tu le malheureux père qui a maudit son propre enfant?
— Non, répondit la voix d’un rugissement provocateur.
— Qui es-tu alors?
— Je suis Judas.
— Quoi Judas! Es-tu Judas Iscariote, l’ancien apôtre?
— Oui, je suis celui-là, gronda l’esprit d’une voix profonde, caverneuse. Un frémissement d’horreur pure parcourut la salle, et le pasteur s’enfuit en courant, suivi de quelques religieuses. Une dégoutante explosion de crachats et de vomissements s’en suivit, et l’exorciste demanda:
— Qu’es-tu venu faire ici?
— Je suis venu pour l’amener au désespoir, ainsi elle se suicidera et se pendra elle-même! Elle doit obtenir la corde, elle doit aller en enfer!
— Est-ce donc un fait que tous ceux qui se suicident vont en enfer?
— Pas vraiment.
— Pourquoi pas?
— Ha, nous les démons sommes ceux qui les poussons à se suicider, à se pendre, tout comme je l’ai fait.
— Ne regrettes-tu pas d’avoir commis un tel acte méprisable?
— Laisse-moi seul. Ne m’ennuie pas avec ton faux dieu. C’était de ma faute… répondit le démon avant de se mettre à délirer d’une terrible manière. Satan étant considéré comme le père de tous les mensonges, personne ne savait vraiment si Judas s’exprimait vraiment à travers Anna, s’il avait été damné ou s’il se trouvait réellement en enfer.

Le Démon Jacob

Puis, quand la prière d’exorcisme fut renouvelée, le démon Jacob fit son apparition. Comme pour Judas, sa voix était celle d’un homme, et l’on devinait qu’avant d’être démon, il avait été un être humain.
— Quel Jacob es-tu? demanda l’exorciste.
— Le père de la jeune fille possédée.

Des développements ultérieurs divulguèrent que l’homme était grossier, brutal, et qu’il avait vécu une vie de débauche et d’avilissement. Il avait tenté à plusieurs reprises de forcer sa fille à commettre l’inceste, mais elle lui avait fermement résisté et il l’avait maudite, appelant des esprits maléfiques à s’emparer d’elle et à l’inciter à commettre tous les péchés possibles. Il souhaitait ainsi détruire son corps et son âme.

Jacob avoua également n’être pas mort subitement mais avoir été autorisé à recevoir le sacrement de l’extrême-onction. Cependant, ce sacrement ne lui avait été d’aucune utilité car il s’en était moqué, tout  avait ridiculisé le prêtre qui était venu à son chevet. Il expliqua à l’assistance que quels que soient les péchés commis dans cette vie, il était toujours possible d’être pardonné avant sa mort et qu’il avait eu, lui-aussi, la possibilité d’être sauvé. Cependant, comme il ne s’était jamais repenti de ses actes, avoir donné son propre enfant aux démons l’avait condamné à la damnation éternelle, ce qu’il ne semblait guère regretter.

De l’enfer où il se trouvait, il continuait à torturer sa fille, Lucifer l’avait volontiers autorisé le à faire, et malgré toutes les prières solennelles de l’Église, il n’était pas disposé à abandonner son corps.  » Mais tu vas obéir! La puissance du Christ et de la Sainte Trinité va t’obliger à retourner dans la fosse de l’enfer à laquelle tu appartiens!  » Un cri de protestation s’en suivit mais le Père Theophilus, sans écouter les suppliques de l’esprit maléfique, recommença à réciter les prières d’exorcisme.

Mina, la maitresse de Jacob, se trouvait en enfer avec lui, et elle dut également répondre aux questions du prêtre. De sa voix haut perchée, presque une voix de fausset, elle s’était déjà fait remarquer parmi les autres entités et elle venait d’avouer son nom. Mina avait vécut une longue vie immorale en étant la maitresse de Jacob alors que sa femme vivait encore, mais son séjour éternel en enfer était surtout du aux assassinats des enfants dont elle s’était rendue coupable et dont elle ne s’était jamais repentie.

— Tu as commis des meurtres quand tu étais encore en vie. Qui as-tu tué?
— Petits, répondit amèrement Mina. Bien évidemment, elle parlait de ses propres enfants.
— Combien en as-tu tué?
— Trois… Non, en fait quatre, répondit l’esprit à contrecœur. Mina se montrait particulièrement haineuse et ses réponses étaient remplies d’une rancœur amère. Son comportement envers le Saint-Sacrement était indescriptible. Elle crachait et vomissait de la plus hideuse des manières de telle sorte que les deux prêtres, le Père Theophilus et le pasteur, devaient utiliser des mouchoirs en permanence pour essuyer la salive de leur soutane.

Pour comprendre cette histoire, il faut savoir que les rencontres et les batailles contre les différents démons s’étendirent sur un certain nombre de jours. Parfois, le dialogue s’arrêtait pendant des heures et des heures, brusquement interrompus par des cris et des hurlements qui ne pouvaient être arrêtés que par la prière et l’exorcisme. Souvent, il était impossible d’obliger les démons à répondre aux questions, et d’innombrables esprits démoniaques venaient régulièrement troubler la cérémonie de leurs manifestations désagréables pour ne pas dire insupportables.

Sous leur influence, le visage d’Anna se déformait tellement que personne ne pouvait plus la reconnaitre et son corps se tordait d’une si incroyable manière que ses contours disparaissaient. Son pauvre visage pale, émacié, devenait brusquement rouge comme de la braise. Ses yeux sortaient de leurs orbites, ses lèvres enflaient, devenant aussi grosses que des mains, et son corps décharné se mettait brusquement à gonfler, devenant si énorme que le pasteur et les quelques sœurs qui la tenaient se retiraient, terrorisées, pensant que la malheureuse malheureuse allait exploser. Parfois, son ventre et ses extrémités devenaient durs comme du fer et de la pierre et, à ce moment-là, son corps était si lourd que les pieds de fer du lit pliaient vers le sol.

L’exorcisme solennel avait commencé par la récitation des litanies de tous les Saints. Toutes les personnes présentes s’étaient agenouillées et avaient répondu aux prières. Au début, les mauvais esprits s’étaient tenus tranquilles, mais plus la cérémonie avançait et plus ils se montraient turbulents. Ils réagissaient aux mots sacrés, grinçant des dents, gémissant et glapissant comme des chiens battus.

La Douleur du Diable

Comme l’exorcisme avançait, il devenait évident que la bénédiction du Saint-Sacrement était celle qui infligeait le plus de souffrance au démon. Il semblait qu’elle lui était insupportable. Il crachait, vomissait, se tordait et délirait à chaque fois que le Père Theophilus récitait la bénédiction, tenant entre ses mains la relique de la Croix. Quand le prêtre se rapprochait de lui avec la croix en lui disant ses mots:  » Regarde le bois de la croix! Arrière, puissance de l’enfer! Le lion de la tribu de Judas doit vaincre!  » le démon s’agitait terriblement mais quand l’exorciste tentait de s’approcher de lui avec la relique de la Croix cachée sous sa soutane, alors le démon devenait fou furieux.  » Va-t’en, va-t’en! hurlait-il. Je ne peux pas le supporter. Oh, c’est de la torture! C’est insupportable! « 
Certaines allocutions lui causaient d’affreuses agonies. Le diable se fanait, languissait, puis le corps de la femme se gonflait et se détendait brusquement, étourdi.

L’Eau Bénite

L’eau bénite était aussi quelque chose d’odieux pour Satan. Quand quelqu’un s’approchait de lui avec de l’eau bénite, il criait:  » Éloigne-moi ça, éloigne-moi cette saleté abominable! Oh, ça brule, ça brule! « 
A une occasion, un morceau de papier portant l’inscription d’une fausse prière en latin fut placée sur la tête d’Anna et la jeune femme n’eut aucune réaction. Les religieuses, qui croyaient la prière authentique, furent surprises de voir Satan rester si calme en présence de mots sacrés mais quelques secondes plus tard, quand l’exorcisme déposa un deuxième document sur le front de la possédée, en un instant il fut déchiré en mille morceaux. Ce dernier avait été béni au préalable et le signe de la croix avait été tracé dessus sans que personne ne le sache.

La Relique

Le pasteur avait gardé une petite relique de Sainte Thérèse de Lisieux dans sa sacristie, cachée dans un ciboire, à l’insu du Père Theophilus. Un jour, pour se protéger, il mit l’objet dans une petite poche de sa soutane et pénétra dans le couvent où l’exorcisme se déroulait. Mais, alors que le pasteur rentrait dans la pièce, le diable se mit à crier:  » Va-t’en, Va-t’en avec cette relique de Sainte Thérèse !
— Nous n’avons aucune relique de Sainte Thérèse! s’exclama l’exorciste.
— Bien sur que si, celui qui vient de rentrer en a une,  » déclara le diable en montrant le pasteur. Puis, alors que le prêtre s’approchait de lui, il se mit à lui cracher dessus. Sainte-Thérèse allait jouer un rôle important dans l’exorcisme d’Anna, tout comme Saint Michel, bien connu pour son terrible combat contre Satan.

Saint Michel

A la seule mention de Saint Michel, Satan commença à reculer, puis, en entendant la prière adressée au saint, le démon sembla brusquement en proie à quelque torture. Il redoutait particulièrement l’invocation à Saint Michel, communément récitée en fin de messe:  » Saint Michel Archange défendez-nous dans le combat; soyez notre secours contre la perfidie et les embûches du démon. Que Dieu exerce sur lui Son empire, nous le demandons en suppliant; et vous, prince de la milice céleste, refoulez en enfer, par la Vertu divine, Satan et les autres esprits malins qui errent dans le monde pour la perte des âmes. Amen. « 

Une circonstance particulière avait poussé le pape Léon XIII à composer cette puissante prière. Un jour, après avoir célébrer la messe, alors qu’il était en conférence avec les Cardinaux, il s’écroula sur le sol. Aussitôt, un médecin fut convoqué et plusieurs se présentèrent. Le pape n’avait plus plus aucune pulsation cardiaque et la vie semblait avoir reflué de son vieux corps affaibli. Mais soudain, il revint à lui, et s’écria:  » Quelle image horrible ai-je été autorisé à voir. « 
Il expliqua alors avoir vu ce qui allait se passer dans l’avenir, les pouvoirs trompeurs et les divagations des démons contre l’Église dans tous les pays. Mais Saint Michel était alors apparu des entrailles du temps et avait jeté Satan et ses cohortes dans l’abîme des enfers, ce qui l’avait poussé à écrire la prière.

Crucifix et relique de la Croix

Comme indiqué précédemment, Satan redoutait le signe de la croix, les crucifix et la relique de la vraie Croix. A une occasion, un crucifix fut remis au Père Theophilus mais quand il le vit, Satan se mit à ricaner:  » Ah, ainsi tu viens avec une croix de carton. Depuis quand est-Il mort sur une croix de papier? Si mes connaissances ne me trompent pas, Il a été crucifié à une croix de bois. « 
Examinant le crucifix de plus près, l’exorciste s’aperçut qu’en effet, il était constitué de papier mâché, et non de bois.
A une autre occasion, le démon se moqua de la manière dont le Christ était cloué sur la croix:  » Les pieds de Jésus n’étaient-ils pas cloués l’un au-dessus de l’autre, et non pas l’un à côté de l’autre? « 
Le Père Theophilus ne pouvait donner à Satan du crédit pour son témoignage, mais de nombreux démons avaient probablement assisté à la crucifixion du Christ, et peut-être était-ce là une vraie indication. Puis, comme les jours passaient, un changement plutôt étrange eut lieu chez le pasteur, qui commença à éprouver une répugnance assez nette à l’idée de chasser le diable du corps d’Anna.

Antipathie

Le Père Steiger ne pouvait plus supporter la présence du Père Theophilus, qui était pourtant un ami très cher et qu’il connaissait intimement depuis des années. Il aurait souhaité ne plus le voir et il regrettait maintenant d’avoir permis cet exorcisme dans sa paroisse, ce qui l’obligeait à le recevoir chez lui. Cette hostilité le perturbait tellement que le prêtre finit par informer l’exorciste de ses sentiments à son égard et envers toute l’affaire. En apprenant cette nouvelle, le Père Theophilus ne montra pas la moindre surprise. L’exorcisme n’était pas terminé et il était normal de supposer que le diable aurait recours à toutes sortes de subterfuges pour déjouer leurs tentatives de le déloger de la possédée.

En outre, le démon semblait détester le pasteur et dès qu’il le pouvait, il affichait sa haine envers lui:  » Tu es la cause de toute l’affaire, tu es celui qui nous torture si douloureusement.  » A une occasion, alors qu’il s’en prenait une nouvelle fois au prêtre, le Père Theophilus l’interpella ainsi:  » Tiens-toi tranquille, toi le serpent infernal! Laisse le pasteur en paix une fois pour toutes. Il ne te nuira point. C’est moi qui vais m’en charger grâce aux pouvoirs de l’exorcisme! « 
Cette tirade agaça le diable, qui se mit à crier:  » C’est le pasteur! C’est de sa faute. S’il n’avait pas donné la permission d’utiliser son église et le couvent, alors tu ne serais pas capable de faire une telle chose. Et même aujourd’hui, tu ne pourrais rien contre nous s’il voulait bien rétracter son consentement. « 

Le diable ne s’en prenait pas à n’importe qui. Il agressait de préférence toutes les personnes qui avaient un quelconque pouvoir, alors qu’il se comportait -plutôt- civilement envers les subordonnés. Jamais il n’attaquait les religieuses ou le cuisinier du pasteur mais il suffisait que le prêtre ou la mère supérieure apparaissent dans la pièce pour qu’il se manifeste de la plus violente des manières. Une fois, la mère supérieure reçut un tel coup sur le visage qu’elle fut repoussée dans un coin de la pièce et Satan menaça à plusieurs reprises le Père Steiger:

— Tu auras à souffrir pour cela.
— Tu ne peux pas me faire de mal de toutes façons. Je suis debout sous la protection de Dieu Tout-Puissant, et contre sa grandeur tu es impuissant, détestable chien de l’enfer.
— Attends! Je te ferai regretter tes mots. Je vais monter toute la paroisse contre toi et te calomnier de telle manière que tu ne seras plus en mesure de te défendre. Ensuite, il ne te restera plus qu’à plier bagage et à partir, plein de honte et de regrets.
— Si telle est la volonté de Dieu, alors Dieu soit loué! Mais tu es impuissant contre lui, toi le vil serpent, toi le tueur d’homme!
— Attends! Je vais vous arranger tous les deux, toi et ton Seigneur et Maitre.
— Ha, comment oses-tu parler comme ça du Tout-Puissant, toi ver de terre méprisable qui rampe dans la poussière même de la terre!
— Je ne peux pas nuire directement à Dieu, mais je peux te toucher toi, et son Église. N’est-ce pas? Tu ne connais pas l’histoire du Mexique? Nous avons préparé un beau gâchis pour Lui là-bas.
— Qui? Vous les démons?
— Qui d’autre l’aurait fait? Tout le crédit nous revient pour avoir amené cette situation. Il va apprendre à mieux nous connaitre. Lucifer est sur Ses traces et il fera ardemment chauffer la bouilloire pour Lui. Ha, ha, ha! « 

Une semaine plus tard, le diable parla un peu plus de ses plans de vengeance envers le pasteur:  » Attendez jusqu’à la fin de la semaine! menaça-t-il. Lorsque viendra le vendredi, alors…  » Le Père Steiger était malade d’entendre les hurlements et les glapissements du diable à longueur de journée, mais il ne prit pas cette menace au sérieux. Pourtant, le vendredi…

L’Expérience de sa Vie

Vendredi matin, après la messe, le téléphone sonna dans la maison paroissiale. L’appel provenait d’un agriculteur dont la mère était gravement malade, et qui espérait, par conséquent, que le Père Steiger pourrait venir lui administrer les derniers sacrements. Il aurait voulu passer chercher le prêtre avec sa voiture mais elle était en panne et il n’arrivait pas à localiser le problème. Il avait essayé de la démarrer pendant plus d’une heure, en vain, et il demandait donc au pasteur d’utiliser sa propre automobile, ou d’appeler un taxi, qu’il lui rembourserait, bien entendu.

Un quart d’heure plus tard le prêtre était en route pour soulager la mourante, portant le Saint-Sacrement avec lui. Une fois son devoir accompli, le Père Steiger reprit la route pour Earling. Cette route lui était familière, il l’avait empruntée des centaines de fois, de jour comme de nuit, et il en connaissait chaque bosse et chaque pierre. Il roulait très prudemment, non seulement car sa voiture était neuve mais également car il se souvenait des menaces du diable. Avant de partir, il avait d’ailleurs prié son ange gardien et Saint-Joseph, son saint patron, de le protéger durant le trajet. Mais brusquement, alors qu’il s’apprêtait à passer un pont surplombant un profond ravin, apparut devant lui un nuage noir foncé et tout devint si obscur que le prêtre eut l’impression d’avoir les yeux bandés. L’instant suivant, la voiture s’écrasait contre la balustrade du pont avec une telle force qu’elle la traversa et resta là, accrochée aux treillis de fer, menaçant à tout instant de tomber dans l’abîme qui s’ouvrait devant elle.

L’accident fut si violent que le bruit alarma un agriculteur qui labourait un champ à une certaine distance. Affolé, l’homme courut jusqu’au pont et voyant la scène, il s’écria:  » Mon Dieu, c’est la voiture du pasteur! Père, père, que s’est-il passé? Êtes-vous blessé? « 

Le pasteur, terrifié, rampa lentement hors des débris sans répondre. Il ne restait pas grand chose de la voiture, dont le volant était en morceaux, mais fort heureusement, la tige de la roue de direction ne lui avait pas transpercé la poitrine comme cela arrivait si souvent dans ce genre d’accident. Le prêtre tenta de se redresser, mais ses jambes le soutenaient à peine.

En voyant l’état du prêtre, l’agriculteur se précipita vers sa maison et quelques instants plus tard, il réapparut dans sa propre voiture. Il aida le blessé, encore tremblant et d’une pâleur extrême, à monter dans le véhicule et se précipita directement chez le médecin le plus proche. Le prêtre était grandement secoué, il avait des blessures superficielles, mais aucun signe de blessures internes.

Les deux hommes quittèrent le cabinet du médecin, puis ils se rendirent directement la maison paroissiale d’Earling, qui était déserte. Tout le monde était déjà au couvent pour assister à l’exorcisme aussi le pasteur décida-t-il de les rejoindre. Mais à peine venait-il de rentrer dans la pièce qu’un rire rugissant, rempli de haine et d’amertume, l’accueillit.  » Hahaha! Hahaha!  » Le diable semblait exulter d’une joie maligne.  » Aujourd’hui, sa fierté a été ravalée. Je lui ai très certainement montré quelque chose. Alors, qu’en est-il de ta nouvelle auto, cette voiture élégante qui a été brisée en mille morceaux? Elle t’a bien servi! « 
En entendant ces mots, tout le monde se retourna et fixa le pasteur avec étonnement. Il était encore pâle, mais aucune de ses blessures n’était visible.
— Le diable dit-il la vérité? lui demandèrent-ils.
— Oui, ce qu’il dit est vrai. Mon auto est complétement détruite. Mais il n’était pas en mesure de me nuire personnellement.
— Notre objectif était de te prendre, mais quelque part, nos plans ont été contrecarrés. Ton puissant Saint Patron nous a empêchés de te faire du mal,  » répondit rapidement le diable.

La nouvelle de cet accident se répandit bientôt dans le village et les habitants, qui éprouvaient une sincère affection pour leur bien-aimé pasteur, recueillirent assez d’argent pour lui acheter une nouvelle voiture. Le diable rappela joyeusement cet incident au pasteur à de multiples reprises, l’assurant  » être prêt à lui offrir plus de plaisir encore. « 

Les Discours de Satan

Il convient de souligner que Satan n’utilisait pas la langue de la pauvre femme possédée pour se faire entendre. Anna était inconsciente la plupart du temps, sa bouche était fermée, et même quand elle était ouverte ses lèvres ne faisaient pas le moindre mouvement et il n’y avait aucun changement dans la forme de sa bouche. Les mauvais esprits parlaient d’une manière audible de quelque part en elle.

Le Savoir de Satan

Les connaissances du diable sur les péchés et les états d’âme des personnes présentes étaient plutôt embarrassantes pour elles, mais comme il n’y avait que des nonnes et des prêtres dans la pièce, ces révélations n’étaient pas extraordinaires. Il essayait néanmoins de troubler les esprits et, faisant référence à des actes peu connus, il tentait de leur donner de l’importance. A un moment donné, alors qu’il venait de demander:  » N’est-il pas vrai que vous avez fait telle ou telle chose dans votre vie passée, durant votre enfance?  » quelqu’un lui répondit:  » Si devant Dieu je ne suis pas coupable de plus grandes fautes dans mes années futures que des péchés de mon enfance, alors je n’ai pas peur. « 
S’en suivit alors la confession la plus étonnante du diable:  » Ce que vous avez déjà avoué, je ne le sais pas.  » D’une surprenante manière, il ignorait les péchés avoués ou repentis.

Satan, père du mensonge, amplifie souvent de petites choses pour les rendre plus graves, faisant une montagne de rien, les déformant délibérément, mélangeant la vérité et le mensonge afin de créer le plus grand désordre. Pour éviter les situations embarrassantes, le Rituel romain demande à l’exorciste et également à tous les témoins d’effectuer une confession approfondie. Il y a quarante ans de cela (écrivait l’auteur en 1928), dans un cas de possession à Wemding, en Allemagne, les hommes les plus forts de la paroisse, des hommes de bonne réputation, avaient été appelés pour maitriser un jeune garçon fou furieux. Cependant, ces gens ne savaient pas à qui ils avaient affaire et les hurlements bestiaux  furent beaucoup moins déconcertants que la description des péchés secrets des uns et des autres dans leurs moindres détails. Bien évidemment, à la suite de cette manifestation, plus personne ne voulut aider à l’exorcisme, ce qui se révéla problématique.

Voulant éviter de telles conséquences, le Père Theophilus, riche de ses expériences, n’avait engagé que des prêtres et des religieuses, mais malgré ces précautions, Satan divulgua astucieusement quelques secrets dont certaines personnes rougirent de honte et il parvint à les faire trembler en menaçant d’en dire d’avantage.

La présence du diable et les nombreux événements étranges qui se produisaient à Earling étaient venus à se savoir dans les communautés voisines. Le Père Steiger avait demandé à sa paroisse de s’unir dans la prière et d’effectuer des visites au Saint-Sacrement afin que le mauvais esprit soit bientôt maitrisé. Étrangement, pas une seule personne ne demanda, par curiosité, à être autorisé à assister à l’exorcisme. De toutes manières, si quelqu’un l’avait demandé, la permission n’aurait pas été accordée.

Différentes voix s’élevaient de la femme possédée, parmi lesquelles quatre pouvaient être clairement identifiées. Belzébuth, Judas Iscariote, Jacob, le père d’Anna, et Mina, la concubine de Jacob.
Anna se souvenait clairement du jour où son père l’avait livrée au diable. Elle n’avait pas mentionné d’autres détails à son sujet, mais le Père Theophilus avait appris d’autres sources que Jacob était l’un des pires persécuteurs de l’Église. Il se tenait à distance des lieux de culte, mais il ne perdait pas une occasion pour ridiculiser les choses spirituelles. Parfois, il assistait à la messe, les jours de fêtes solennelles, mais seulement pour y trouver de nouvelles idées de moqueries, en riant ensuite avec ses amis et ses compagnons. Mina, sa concubine, était pleinement son égale dans ce domaine et le plus surprenant, pour le Père Theophilus, était que ce méchant homme et ce père blasphématoire avait été béni d’une telle fille vertueuse, pieuse, pure et innocente.
Outre les démons mentionnés ci-dessus, se trouvaient en Anna un grand nombre d’esprits impurs, parmi lesquels certains démons muets, des soi-disant esprits vengeurs qui se firent particulièrement remarquer.

Les Démons Inférieurs

Les démons silencieux étaient innombrables. Apparemment, ils faisaient partie d’une classe inférieure, car ils ne présentaient aucune forme de puissance. Leurs voix étaient un concert incompréhensible de sons d’où aucune réponse ne pouvait être distinguée. Il n’y avait aucun discours articulé, mais plutôt des gémissements pitoyables et de faibles hurlements. Ils ne résistaient que rarement aux puissants effets de l’exorcisme, ils venaient en horde, repartaient de la même manière, et de nouveaux démons du même type les remplaçaient.

Les Esprits Vengeurs

Les esprits vengeurs étaient sauvages, violents, agressifs, grossiers et c’était précisément eux qui menaçaient le pasteur de lui faire regretter son consentement. Leurs intrigues avaient presque réussi à le dresser contre son ami de longue date, le Père Theophilus. Ces esprits semblaient emplis de colère envers tous les êtres humains et leur attitude démontrait de monstrueux mélanges de haine, d’envie, de méchanceté, de vengeance, de tromperie et de ruse.

Les Rôdeurs de la Nuit

Pendant le processus d’exorcisme, les mauvais esprits avaient, à plusieurs reprises, fait des déclarations qui indiquaient qu’ils cherchaient à épuiser le pasteur. Une fois, au milieu de la nuit, le Père Steiger fut soudainement réveillé par des perturbations dans sa chambre. Il se demanda tout d’abord si des rats ne rongeaient pas quelque chose, puis, écoutant plus attentivement, il remarqua que le bruit semblait tout proche, près de son lit. Durant les quatorze années passées dans la maison, jamais il n’avait rien connu de tel. Surpris que tant de rats puissent courir librement dans la pièce, il frappa de son poing sur le mur pour éloigner les rongeurs, en vain. Il utilisa ensuite sa canne, et comme rien ne semblait les faire fuir, il prit sa chaussure et se mit à marteler le mur. Malheureusement, au lieu de s’arrêter, le bruit devint pire encore. Stupéfait, le prêtre songea alors que s’il attendait, alors les rôdeurs de la nuit disparaitraient d’eux-mêmes. Il attendit… encore et encore, et brusquement, le martèlement commença à retentir de bas en haut, passant d’un mur à l’autre, menaçant de les ruiner.

Après la dure journée qu’il venait de passer, le Père Steiger aurait eu besoin d’une bonne nuit de repos mais alors qu’il songeait à cela, soudain lui vint une idée qui lui sembla tout d’abord stupide. Peut-être y avait-il une relation entre ces rôdeurs de la nuit et les mauvais esprits qu’il combattait. Les démons l’avaient menacé, et peut-être mettaient-ils ainsi leur menace à exécution. Si tel était le cas, il devait se résoudre à utiliser ses armes spirituelles contre eux. Se fortifiant avec son étole, il tenta une nouvelle fois de dormir, mais même s’il parut faiblir, le bruit ne cessa point.  » Attends maudit chien de l’enfer, je vais encore me débarrasser de toi! « 
Le pasteur se leva de nouveau, alluma deux bougies devant un crucifix et récita la formule du petit exorcisme contre les mauvais esprits. Apparemment, c’était là une langue que ces démons comprenaient car immédiatement, le silence se fit.

Quelques nuits plus tard, le Père Steiger connut une nouvelle nuit agitée. Les portes cliquetaient, la maison tremblait, et le malheureux s’imaginait en proie à une nouvelle attaque démoniaque quand soudain, riant de lui-même, il comprit qu’un train traversait le village et qu’il s’était alarmé d’un rien. Étrangement, il entendait son moteur tourner mais pas le bruit de son déplacement. Au bout de quelques minutes enfin le bruit cessa mais, presque aussitôt, il recommença, cette fois au niveau de la porte. Pensant qu’elle était restée entrouverte et qu’elle cognait contre le mur, le pasteur se releva à sa grande surprise, il la trouva fermée. Saisissant la poignée, il tenta alors de l’ouvrir mais malgré tous ses efforts, la porte resta close. Comprenant que le diable était revenu lui jouer un de ses tours, le pasteur prit de l’eau bénite, en saupoudra la porte, les fenêtres, et la pièce puis il récita la formule du petit exorcisme et brusquement, le vacarme cessa.  » O toi misérable Satan, maintenant je connais ta ruse furtive. Attends, je vais bientôt t’enseigner les bonnes manières. « 

Plus tard, il apprit que d’autres prêtres, qui avaient participé à l’exorcisme, avaient connu les mêmes désagréments et qu’à certains, des choses pires étaient même arrivées. Quand le soir tombait, ils n’osaient plus se retirer sans avoir de l’eau bénite et leur étole avec eux. Les bruits qu’ils entendaient étaient souvent si persistants que l’un ou l’autre devait se relever la nuit pour en chercher la cause, ne trouvant la paix qu’après avoir prié. Des rôdeurs de la nuit de ce genre ont été rapportés dans d’autres cas d’exorcisme, et ils peuvent se manifester longtemps après que les mauvais esprits aient été chassés de la personne possédée.

Les Conséquences de l’Exorcisme pour Anna

Chaque jour, peu de temps après le début du rituel, Anna perdait connaissance. Lors la cérémonie prenait fin, alors elle se réveillait et elle était elle-même. Elle disait n’avoir aucune connaissance de ce qui se passait durant les séances. Elle était fatiguée, pour ne pas dire épuisée, et elle devait souvent être transportée pour aller d’un endroit à un autre. Durant cette période, Anna ne parvenait pas à manger d’aliments solides, de la nourriture liquide lui était injectée, mais, malgré sa faiblesse et le peu de matière ingérée, elle vomissait vingt à trente fois par jour.

Il semblait incroyable qu’elle arrive à supporter l’exorcisme en dépit de son état, surtout que le diable lui infligeait mille sévices. A une occasion, sa souffrance fut telle que son visage prit la couleur de la mort.  » Grand Dieu, elle est en train de mourir. Je vais chercher les saintes huiles!  » s’écria le Père Steiger, qui pensait qu’il y aurait de terribles conséquences pour eux si jamais la possédée mourait dans ces conditions. Fort de son expérience, le Père Theophilus l’arrêta:  » Restez ici mon ami, la femme ne mourra pas. Absolument pas. Cette manifestation n’est que l’une des ruses de Satan. Il ne peut pas et n’est pas autorisé à la tuer. Absolument pas. « 

L’Exorcisme dura vingt-trois jours

La durée de l’exorcisme s’étendit sur une période exceptionnellement longue. Il dura vingt-trois jours, divisés en trois étapes différentes. Il commençait tôt le matin et se terminait tard le soir. Le diable tentait d’affaiblir les prêtres et les religieuses pour les inciter à relâcher leurs efforts et le pasteur ne pouvait pas toujours être présent. Parfois, le soin des âmes de sa paroisse l’éloignait et il arrivait qu’une multitude de choses, terribles et fascinantes, aient lieu en son absence, mais cependant d’autres prêtres dignes de foi se trouvaient là, prêts à témoigner.

La formule de l’exorcisme était répétée depuis plus que semaines quand il commença à y avoir quelques indications suggérant que le diable pourrait être contraint de quitter Anna. Le Père Theophilus avait rapidement réussi à éloigner un grand nombre de démons par la puissance de la prière et des exorcismes, mais les quatre plus vils ne purent être délogés avant une longue période. Satan semblait avoir rassemblé toutes les forces de l’enfer pour remporter une victoire finale dans cette affaire.

Haut Commandant

Lucifer

Il était devenu évident que les forces de l’enfer se trouvaient sous la direction d’un commandant en chef qui, comme un général, envoyait de nouvelles recrues au combat à chaque fois que les anciens combattants, épuisés, étaient contraints à l’abandon. Lorsqu’ils se voyaient forcés de partir, ils soupiraient, suppliaient pitoyablement et se plaignaient de leurs voix maléfiques:  » Oh, ce que nous avons du mettre en place ici, c’est tout simplement terrible tout ce que nous avons souffert. « 
D’autres voix encourageaient les démons, les exhortant à ne pas laisser la place:  » Et comment nous allons grincer des dents et souffrir, comment il va nous torturer à nouveau si nous revenons sans avoir accompli notre tâche.  » Ils évoquaient clairement Lucifer comme un bourreau.

Afin de ne plus laisser à Satan et à ses hordes aucun répit, le Père Theophilus décida finalement de continuer les exorcismes toute la nuit, espérant ainsi atteindre la victoire. L’exorciste possédait une grande endurance et des nerfs d’acier, mais il épuisa ses dernières ressources dans cet exploit presque surhumain.
Pendant trois jours et trois nuits, il continua sans entracte. Les sœurs qui l’assistaient en alternance étaient au bord de la dépression mais l’effet désiré ne venait pas. Le Père Theophilus était à bout de force, il avait l’air d’un cadavre ambulant et son visage semblait avoir vieilli de vingt ans en trois semaines.

Antéchrist

Le lecteur se demande peut-être si le diable, à un moment donné, n’a pas révélé des choses intéressantes.
Il faut garder à l’esprit que les questions posées au diable et les réponses qu’il donnait n’étaient nullement un dialogue ludique entre les mauvais esprits et l’exorciste. Souvent, une longue période survenait avant qu’une réponse ne puisse être extirpée à Satan. La plupart du temps, quand il était invité à répondre en vertu des pouvoirs de l’exorcisme, il poussait un mugissement horrible, gémissait ou hurlait. L’exercice était si terrible, si fastidieux et si frustrant que parfois l’exorciste se retrouvait complètement recouvert de sueur et qu’il devait changer ses vêtements trois ou quatre fois dans la journée. Vers la fin, il était si faible qu’il ne pouvait continuer qu’avec l’aide de Dieu et qu’il demandait grâce pour sa propre vie.

Toutes les questions que posaient le Père Theophilus se référaient à l’exorcisme, mais parfois les réponses du diable suggéraient d’autres questions qui s’éloignaient de l’affaire. En de telles occasions, il était généralement snobé par le démon, qui lui répondait de manière grossière et rude:  » Tais-toi, ce ne sont pas tes affaires.

A un moment donné, Satan devint plutôt bavard à propos de l’Antéchrist. Lorsqu’il lui fut demandé ce qu’il voulait dire en affirmant que la rage furieuse de l’Antéchrist serait dirigée contre l’Église de Dieu, il affirma que c’était évident et continua insolemment:  » Oui, Satan est déjà à l’étranger, et l’Antéchrist est déjà né en Palestine. Mais il est encore jeune. Il doit d’abord grandir incognito avant que sa puissance ne devienne connue. « 
A une autre occasion, quand le Père Theophilus insista pour que le diable parte et retourne en enfer, ce dernier répondit dans un grognement:  » Comment peux-tu me bannir en enfer? Je dois être libre d’ouvrir la voie pour l’Antichrist.  » Et une fois encore, il parla à travers la femme possédée:  » Nous savons beaucoup de choses. Nous lisons les signes du temps. Ce siècle est le dernier. Quand les gens écriront l’an 2000, la fin sera à portée de main…  » Que le père du mensonge, comme notre Seigneur lui-même décrit Satan, ait dit la vérité, il est impossible d’en juger.

Puis les mauvais esprits commencèrent à hurler et à glapir de crainte alors que les prières d’exorcisme étaient solennellement prononcées et que les bénédictions avec la relique de la croix et l’Hostie consacrées étaient données:  » Oh, nous ne pouvons pas le supporter plus longtemps! Nous souffrons intensément! Arrête-ça, arrête-ça! C’est bien pire que l’enfer!  » Ces gémissements, indiquant la douleur et la souffrance, étaient le signal d’un départ imminent.
— Par conséquent, partez, maudites créatures! Il est en votre pouvoir de vous libérer de ces souffrances. Laissez cette pauvre femme en paix! Je vous en conjure, au nom de Dieu Tout-Puissant, au nom de Jésus Christ de Nazareth, au nom de Sa mère la plus pure, la Vierge Marie, au nom de l’Archange Michael!
— Oh oui, gémissaient-ils. Nous sommes prêts. Mais Lucifer ne nous laissera pas.
— Dites la vérité. Est-ce que Lucifer seul est la cause de tout ceci?
— Non, lui tout seul, cela ne pourrait pas être. La justice de Dieu ne le permettrait pas mais l’expiation n’a pas encore été suffisante pour elle. « 
Cette information fut précieuse, car elle incita le pasteur à demander aux membres de sa paroisse d’augmenter leurs actes d’expiation pour aider la femme.

Plus d’Expiation

Conformément à la demande de leur pasteur, les paroissiens se rendirent volontiers à l’église et passèrent des heures en adoration devant le Saint Sacrement. Du matin jusqu’au soir ils priaient avec ferveur, demandant la destruction des puissances infernales et la victoire de l’Église sur les forces du mal. Tout en continuant à suivre le rituel, le prêtre encourageait les siens au jeune et à la pénitence, espérant que leurs actions renforceraient les prières de l’exorcisme.

Bataille entre Bons et Mauvais Esprits

A cette époque, Anna rapporta que durant ses périodes de repos, elle avait des visions de batailles horribles entre les bons et les mauvais esprits qui se succédaient. Satan faisait de son mieux pour ne pas être chassé. D’après elle, de nombreux anges assistaient à l’exorcisme, certains se présentant sur des chevaux blancs, et sous la direction de Saint-Michel, ils mettaient les serpents infernaux en déroute et chassaient les démons dans l’abime de l’enfer.

Saint-Thérèse de Lisieux

Saint-Thérèse de Lisieux apparut également à Anna au cours de ces journées cruciales et prononça des paroles consolatrices:  » Ne perds pas courage. Le pasteur en particulier ne devrait pas renoncer à l’espoir. La fin est pour bientôt. « 
Cette apparition se produisit un certain soir où, à leur grande surprise, les religieuse et la sœur du pasteur remarquèrent soudainement un bouquet de roses blanches au plafond. Puis, après un moment, la vision disparut progressivement. Le pasteur nota les regards anxieux de ces dames tournés vers le plafond, mais quand il les suivit, il ne remarqua rien. Cependant, ces paroles encourageantes avaient donné un nouvel élan aux prêtres. Maintenant, ils savaient que la victoire était proche.

Au cours des derniers jours, les démons montraient leur grande crainte à l’idée de retourner en enfer. Le Père Theophilus insistait pour qu’ils partent, encore et encore, et ils plaidaient pitoyablement:  » Tout sauf ça, tout sauf ça.  » Ils voulaient bien être bannis dans un autre endroit, ou dans une autre créature, mais ils ne voulaient pas être repoussés en enfer.
— Mais vous êtes déjà en enfer, leur dit l’exorciste.
— C’est vrai, c’est vrai, gémissaient-ils. Nous apportons l’enfer avec nous. Pourtant, c’est un soulagement que d’être autorisés à se déplacer sur la Terre jusqu’à ce que (au jugement dernier) nous devions nous rabattre en enfer et soyons damnés pour l’éternité. « 

Les Démons Partent

Peu à peu, la résistance des démons déclinait. Ils semblaient désespérés, gémissaient et il devenait évident qu’ils ne pouvaient plus supporter les tortures de l’exorcisme. Alors, avec une grande angoisse, ils expliquèrent qu’ils allaient finalement retourner en enfer. Cependant, il convenait de se méfier de leurs paroles, les démons étant, par essence, trompeurs et peu fiables. Parfois, ils font semblant de quitter le possédé, qui se sent bien pendant un certain temps, afin de se défaire des observateurs non avertis. Ce fut pour cette raison que le Père Theophilus, complètement épuisé, exigea au nom de la Très Sainte Trinité que les démons fassent un signe au moment de leur départ en lui donnant leurs noms respectifs.  » Oui,  » promirent-ils catégoriquement.

Le vingt-troisième jour de décembre 1928, vers 20 heures, la possédée se libéra brusquement de l’emprise des sœurs et d’une secousse, se dressa devant eux. Seuls ses talons touchaient le lit et à première vue, elle semblait suspendue au plafond.  » Redescendez-la! Redescendez-la!  » cria le pasteur alors que le Père Theophilus la bénissait de sa relique de la Croix en disant:  » Partez, démons de l’enfer! Arrière, Satan, le Lion de Juda règne! « 

Au même moment, la rigidité du corps de la femme disparut et elle s’effondra sur le lit. Puis un son perçant remplit la salle, la faisant trembler violemment et des voix purent être entendues:  » Belzébuth, Judas, Jacob, Mina. » Ces noms furent répétés un certain nombre de fois, avant de se faner dans le lointain.  » Belzébuth, Judas, Jacob, Mina. Enfer-Enfer-Enfer! « 
Toutes les personnes présentes furent terrifiées par cette scène horrible. C’était là le signe tant attendu, indiquant que Satan et les démons avaient été forcés de quitter leur victime et de retourner en enfer.
Alors, la femme ouvrit les yeux et la bouche, et elle sourit aimablement. Puis, pour la première fois en douze ans, elle prononça le nom de Jésus avec une piété enfantine. Des larmes de joie remplirent alors les yeux des témoins mais brusquement, une terrible odeur vint gâcher les réjouissances et toutes les fenêtres durent être ouvertes. La puanteur était surnaturelle et insupportable. Les démons infernaux avaient du abandonner leur victime, mais ils leur avaient laissé un souvenir.

Après son exorcisme, Anna, toujours bonne et pieuse, assista fréquemment à la messe. La communion, qui était autrefois une torture pour elle, était maintenant une joie qui remplissait son cœur et son âme.

Le Père Theophilus rapporta avoir vu nettement Lucifer se tenir devant lui pendant une demi-heure au cours de l’exorcisme. Il lui était apparu sous la forme d’un être de feu dans sa réalité démoniaque. Il portait une couronne sur la tête, une épée de feu dans la main et Belzébuth se tenait près de lui. Toute la salle s’était alors remplie de flammes et Lucifer, dans une colère terrible, s’était mis à blasphémer:  » Si je pouvais, je t’aurais étranglé depuis longtemps. Si seulement j’étais en pleine possession de mes pouvoirs, tu expérimenterais rapidement ce que je peux te faire. « 
Grâce aux pouvoirs du Christ, le démon avait été privé de sa force originelle et l’exorcisme avait également affaibli son influence. Le Père Theophilus lui avait alors demandé:
— Que peux-tu accomplir, toi impuissant Lucifer?
— Que ferais-tu, si tu étais lié comme je le suis?  » lui avait répondu le démon.

Le Père Theophilus, qui s’était occupé de dix-neuf cas de possession au cours des dernières années, semblait convaincu que ces nombreux cas de possession indiquaient le début d’une grande bataille entre le Christ et l’Antéchrist. Outre l’Antéchrist, il pensait que viendrait un faux prophète, en réalité Lucifer, qui accomplirait merveilles et faux miracles. Selon lui, cet homme ne naitrait pas d’une femme, mais il se façonnerait un corps lui-même et marcherait comme un homme parmi les hommes. Cependant, les fidèles ne devaient pas être effrayés, car toutes les puissances célestes et ses innombrables anges se battraient à leur côté.

Supplément

Le récit ci-dessus ne rapporte que les exorcismes qui eurent lieu à Earling, Iowa. Hors, Mina, la tante d’Anna, était une sorcière réputée et la rumeur prétendait qu’elle pratiquait la magie noire. En 1908, pour une raison inconnue, Mina avait mêlé des herbes à la nourriture d’Anna et appelant quelques esprits maléfiques, elle leur avait demandé de tourmenter la jeune femme. Le 18 juin 1912, le Père Theophilus avait libéré Anna des forces démoniaques mais peu de temps après Jacob, son père, lui avait jeté une nouvelle malédiction, et les esprits étaient revenus exercer leur emprise.

Témoignage de Theresa Wegerer, gouvernante du Père Steiger

Theresa Wegerer

 » J’ai été témoin de presque toute la période de l’exorcisme du cas de possession d’Earling et je peux honnêtement dire que les faits rapportés dans Begone Satan sont corrects. Certaines scènes étaient encore plus effrayantes que ce qui est décrit dans le livret. Il n’y a pas le moindre doute dans mon esprit, les démons étaient présents et je n’oublierai jamais les scènes horribles, abominables, dégoutantes et sales, aussi longtemps que je vivrai. Toutes les religieuses ont demandé une mutation et ont été transféré l’année suivante.

La femme est revenue à Earling, qui se trouvait à 1600kms de chez elle, quatre mois après l’exorcisme pour faire une neuvaine d’actions de grâce. C’était à la demande du Christ lui-même. Au cours de son séjour, elle m’a dit comment notre Bienheureux Seigneur lui apparaissait fréquemment et l’encourageait à être fidèle. « 

Source: Begone Satan! A Soul-Stirring Account of Diabolical Possession, du Rev. Carl Vogl.

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